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Co-conception et acceptance des enseignants de maternelle d’une application éducative sur tablette

Lara HOAREAU

Niveaux

Maternelle

 

 

Public

Enseignant·e·s de maternelle

 

 

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Lara HOAREAU — Voir ses publications

Laboratoire 2LPN

Action/Projet associé(e)

Ressource(s) associée(s)

À quelles questions cette étude tente-t-elle de répondre ?

Cette étude s’est intéressée à la co-conception et l’acceptance d’enseignants de maternelle d’une application éducative sur tablette.
La co-conception pour le développement d’une application éducative sur tablette comme le définit Kucirkova (2017) caractérise la dynamique de collaboration entre des enseignant·e·s-chercheur·euse·s et doctorant·e·s, des acteurs éducatifs et des ingénieur·e·s informatiques. Cette dynamique permet de construire des outils qui sont adaptés à l’usage en salle de classe.

La notion d’acceptance se réfère aux facteurs en jeu lors du choix d’adopter ou non un outil numérique lorsqu’il est déjà présent et utilisé dans un environnement donné. Les modèles théoriques de l’acceptance ont évolué durant les dernières décennies (Alexandre et al., 2018). À titre d’exemple le modèle TAM (pour Technology Acceptance Model) proposé par Davis (1993), a subi plusieurs modifications pour aboutir au TAM-3 (Venkatesh et Bala, 2008). Les modèles insèrent de plus en plus de sources expliquant l’acceptance et soulignent la complexité du concept.

Trois questions principales sont posées à travers ce travail de recherche :
Question 1 : Quels sont les apports d’une démarche de co-conception pour le développement d’une application éducative sur tablette à destination d’enfants de maternelle ?
Question 2 : Quelles sont les caractéristiques qui influencent l’acceptance d’une application éducative sur tablette pour des enseignant·e·s de maternelle ?
Question 3 : Est-ce que l’acceptance d’une application éducative sur tablette par des enseignant·e·s de maternelle influence l’apprentissage des élèves ?

Pourquoi ces questions sont-elles pertinentes ?

L’usage du numérique est de plus en plus présent dans les classes. Des recherches ont essayé de déterminer si l’utilisation d’écrans tactiles dans le cadre de l’enseignement entraîne une amélioration des résultats d’apprentissage des jeunes enfants. Alors que certaines études ont montré un effet bénéfique d’une telle pratique sur les résultats d’apprentissage des jeunes enfants (voir par exemple, Papadakis et al., 2018 ; Patchan et Puranik, 2016 ; Schacter et Jo, 2016), d’autres études en revanche n’ont relevé aucun effet sur les résultats d’apprentissage (voir par exemple, Piotrowski et Krcmar, 2017 ; Schroeder et Kirkorian, 2016 ; Zipke, 2017). Par ailleurs, il existe un nombre conséquent d’applications s’auto-proclamant « éducative » dans les AppStores à disposition des parents et/ou des enseignant·e·s. Selon Judge et al. (2015), près de 1 000 applications seraient même ajoutées tous les jours. Or, la plupart de ces applications se focalisent sur l’aspect attrayant et ludique pour « attirer le client ». Les méthodes d’apprentissages ne sont pas basées sur la recherche et l’évaluation systématique de l’efficacité de ces applications est inexistante. Ainsi, ces applications ne sont pas toujours adaptées au niveau des enfants et n’offrent pas d’apprentissage durable (Hirsh-Pasek et al., 2015 ; Papadakis et al., 2018). D’une part, il est donc important de créer des applications éducatives dotées de propriétés pédagogiques combinant des principes issus de travaux de recherches dans les domaines des sciences de l’éducation, de la psychologie et de l’ergonomie avec les caractéristiques de la tablette numérique. Et d’autre part, il faut nous donner les moyens d’évaluer l’efficacité de ces applications sur les apprentissages.

Cependant, peu de chercheur·e·s sont engagé·e·s dans la conception et l’implémentation des applications éducatives au sein des écoles, et plus particulièrement des classes. Ainsi, une démarche de collaboration et de co-conception entre plusieurs experts — chercheur·euse·s, développeur·euse·s, enseignant·e·s — pour le développement d’une application éducative serait bénéfique pour l’élaboration de produits de qualité (Kucirkova, 2017). La prise en compte de la co-conception dans le développement d’un outil numérique favorisant les apprentissages semble donc essentielle (Question 1).

Notre second point d’intérêt, l’acceptance, est relative à nos Questions 2 et 3. L’acceptance est très peu étudiée en lien avec les performances des élèves suite à la mise en place d’un dispositif numérique. En effet, les travaux existants se sont intéressés soit à l’impact des outils numériques sur les performances des élèves, soit à l’acceptance de ces outils numériques, mais peu de recherches ont examiné le lien entre les deux, notamment en préscolaire (Granić et Marangunić, 2019). Quelques recherches faites dans des niveaux d’études supérieurs observent que l’acceptance d’un outil par des étudiants permet d’améliorer leurs performances à une tâche (Avila et Lavadia, 2019 ; De Muth et Bruskiewitz, 2006). D’autres études révèlent en revanche un paradoxe performance-préférence (Lombard et al., 2018) montrant que même siles étudiant·e·s préféraient utiliser un certain dispositif, ce dernier ne permettait pas d’améliorer leurs performances dans une tâche de mémorisation d’informations sur des supports différents. Cependant, ces études se focalisent seulement sur l’acceptance des étudiant·e·s, et non celle des enseignant·e·s alors que ce sont les enseignant·e·s qui implémentent les outils numériques dans les classes, en particulier chez les plus jeunes. Ainsi, évaluer le lien entre acceptance d’un outil numérique par les enseignant·e·s et évolution des apprentissages d’élèves de maternelle nous amène à poser de nouvelles questions de recherche qui nécessitent d’être explorées.

Quelle méthodologie de recherche a-t-on utilisée ?

Contexte de la recherche
Ce travail de thèse s’inscrit dans le cadre du projet LINUMEN (LIttératie et NUMératie Emergentespar le Numérique), lauréat de l’appel à projets e-FRAN (PIA2). Ce projet avait pour objectifs de développer et tester une application éducative sur tablette numérique à l’usage d’enfants dans le contexte de la maternelle. Pour ce faire, le travail s’est divisé en deux phases : une première phase de co-conception et une seconde phase d’expérimentation.

Au cours de la première phase (Mars 2017 — Octobre 2018) une équipe pluri-catégorielle constituée de chercheur·euse·s, d’acteurs éducatifs et d’ingénieur·e·s en informatique ont participé à la co-conception de l’application éducative AppLINOU (Apprendre avec Linou en maternelle). Cette dernière se base sur le modèle de co-conception iRPD (Kucirkova, 2017). En nous basant sur la littérature scientifique, notamment les quatre piliers des apprentissages de Hirsh-Pasek et al. (2015), l’expérience des acteurs du terrain, et l’expertise des ingénieur·e·s informatiques, nous avons développé AppLINOU qui fait partie des rares applications françaises développées par une équipe universitaire pour des enfants d’âge préscolaire (Hoareau et al., 2020).

AppLINOU comporte vingt activités travaillant différentes compétences de littératie émergente (LE) et de numératie émergente (NE). Les activités proposées recouvrent cinq périodes, du début de la Moyenne Section (MS) jusqu’à la fin de la Grande Section (GS), en proposant des exercices à la difficulté progressive et adaptée à l’âge des enfants. Ces activités présentent des plus-values éducatives proposées essentiellement par une mascotte prénommée LINOU. Son rôle est d’expliquer à l’enfant ce qu’il va apprendre dans l’activité avant qu’elle ne commence (et donc de contribuer à la mise en sens), mais aussi de donner des feedbacks lors des exercices.

Au cours de la seconde phase (phase d’expérimentation, Octobre 2018 — Juin 2020), nous avons testé cette application selon une méthodologie quasi-expérimentale. Pour cela, nous avons établi deux groupes (un groupe expérimental et un groupe contrôle) qui ont été soumis à des pratiques de classe différentes. Les enseignant·e·s du groupe expérimental utilisaient l’application AppLINOU avec leurs élèves en complément des pratiques « classiques » alors que, dans le groupe contrôle, les enseignant·e·s suivaient les programmes de l’école maternelle sans modification dans leur pratique. Cette méthode permet ainsi de comparer les résultats des élèves à la fin et d’évaluer l’effet de la présence du dispositif.

Ce travail de recherche se focalisant sur l’acceptance de l’application AppLINOU par les enseignant·e·s de maternelle, nous nous intéressons exclusivement au groupe expérimental (voir le travail de recherche d’Aude THOMAS pour un bilan de l’évaluation de l’application AppLINOU sur le développement des compétences en LE et NE).

Participants
Au total, 62 enseignant·e·s ont utilisé AppLINOU dans 40 classes de maternelle réparties sur 32écoles maternelles de Meurthe-et-Moselle (académie de Nancy-Metz). L’échantillon était composé de 59 femmes et 2 hommes. Cet écart reflète la forte féminisation de la profession à ce niveau d’enseignement qui ne diffère pas du chiffre national qui est de 95 % de femmes selon la DEPP. De plus, ce groupe présente entre 1 et 40 ans d’expérience d’enseignement (moyenne = 22,6 ans et écart-type = 8,4). En terme d’effectif élèves, ce travail de recherche a porté sur 725 élèves (356 filles et 369 garçons). Les âges des enfants variaient entre 3,92 et 5,28 années (moyenne = 4,42 ans et écart-type = 0,29) au début de l’expérimentation. Le groupe contrôle était composé de 277 élèves et le groupe expérimental regroupait 448 élèves. Les élèves scolarisés en Réseau d’Education Prioritaire (REP) représentaient plus de 22 % de l’échantillon et étaient proportionnellement répartis entre les deux groupes.

Protocole expérimental
Dans les classes utilisant AppLINOU, les enseignant·e·s devaient suivre un protocole précis avec leurs élèves. En MS, les élèves ont utilisé l’application pendant dix semaines enclasse. Chaque élève réalisait deux activités de littératie et deux activités de numératie par semaine, représentant ainsi quatre séances d’utilisation sur une semaine et correspondant environ à une heure d’utilisation par semaine.

Toutes les séances suivaient un ordre prédéfini permettant aux élèves d’aborder des notions de plus en plus complexes. Chaque activité durait 10 à 15 minutes maximum. L’année suivante, le même protocole a été reconduit pendant 15 semaines avec ces mêmes élèves devenus élèves de GS.

Mesures
Afin de répondre à nos questions de recherche, nous avons mis en place trois études.

La première concernant la co-conception est une étude qualitative qui n’amène pas de mesure particulière mais vient discuter, à la lumière de la recherche scientifique, l’intérêt du travail de collaboration pour développer une application éducative (Hoareau et al., 2020).

La deuxième étude a cherché à mettre en lien des caractéristiques propres aux enseignant·e·s qui pourraient influencer l’acceptance de l’application AppLINOU (Hoareau et al., 2021). À l’aide d’un questionnaire, nous avons recueilli des données démographiques ainsi que les croyances sur le numérique. Un questionnaire mesurant l’acceptance a été validé et met en évidence trois facteurs de l’acceptance pour les enseignant·e·s de maternelle. Les facteurs identifiés sont : l’acceptabilité d’un point de vue social, l’utilité et l’utilisabilité. L’acceptabilité sociale correspond, dans notre travail, aux perceptions de l’enseignant·e vis-à-vis du dispositif. L’intérêt ici est d’évaluer si le dispositif est en lien avec leur pratique professionnelle, ce qui susciterait l’envie de le partager avec ses collègues. L’utilité et l’utilisabilité se réfèrent à des dimensions plus pratiques. Ainsi, l’utilité correspond à la pertinence du dispositif pour atteindre les objectifs pédagogiques prévus, c’est-à-dire, de faire travailler les élèves dans leurs apprentissages en correspondance avec les programmes de l’école maternelle. Enfin, l’utilisabilité correspond au degré de facilité d’utilisation du dispositif par les élèves. Une bonne utilisabilité favorise l’autonomie de l’élève face à la tablette sans que l’enseignant·e n’ait besoin d’intervenir.

À travers la troisième étude, nous nous sommes intéressés aux liens entre l’acceptance d’AppLINOU par les enseignant·e·s et les progrès des élèves en LE et en NE. Le questionnaire mesurant l’acceptance des enseignants de l’étude précédente a été utilisé, et les résultats ont été comparés aux niveaux des élèves dans les compétences de LE et NE en fin d’année. Ces niveaux ont été évalués à l’aide d’un outil de mesure élaboré dans le cadre du projet par des enquêteur·trice·s formé·e·s nommé EELENE.

Quels résultats a-t-on obtenus ?

Question 1 : La démarche de collaboration a permis d’échanger des points de vue entre les connaissances théoriques apportées par les enseignant·e·s-chercheur·euse·s, les connaissances pratiques apportées par les acteurs éducatifs, et les connaissances techniques apportées par les ingénieur·e·s informatiques. Les échanges au sein de l’équipe pluri-catégorielle de co-conception ont permis de dégager cinq principes qui ont présidé l’élaboration de notre application AppLINOU : (1) une adéquation aux programmes de l’école maternelle ; (2) une progression de la complexité des notions abordées du début de la MS à la fin de la GS ; (3) une ergonomie adaptée aux enfants et favorisant leur autonomie ; (4) un aspect ludique à travers des activités variées et la présence d’une mascotte mais qui ne prennent pas le pas sur (5) les plus-values pédagogiques inspirées par les modèles d’apprentissages issus de la recherche et qui mettent en avant, par exemple, l’importance de l’interactivité et des feedbacks (Hirsh-Pasek et al., 2015).

Cette méthode a permis de développer une application testable par les élèves. Par ailleurs, il est prévu de créer une version améliorée de l’application intégrant des feedbacks interactifs plus riches ainsi que des fonctionnalités supplémentaires comme un carnet de bord enseignant. En effet, les contraintes temporelles de l’étude ont obligé l’équipe de co-conception à faire des choix de développement et restreindre les fonctionnalités de l’application.

La démarche de collaboration entre différents acteurs est à encourager. Bien qu’il existe toujours des contraintes matérielles et organisationnelles, les échanges impliquent des personnes familières au domaine de l’éducation, expertes des attentes pédagogiques et de la réalité du terrain. Cet éclairage est important et permet de développer des outils adaptés à la classe et aux élèves.

Question 2 : Les résultats de l’enquête par questionnaire montrent que les enseignant·e·s ont une bonne acceptance de AppLINOU. Cependant, cette valeur de l’acceptance peut se retrouver modérée par certaines variables. En effet, les caractéristiques du lieu d’exercice se sont révélées des facteurs déterminants influençant l’acceptance. Les enseignant·e·s qui exercent en REP ont des scores moins élevés aux dimensions d’acceptance que ceux qui exercent en dehors des REP. Les effets du lieu d’exercice semblent plus élevés pour ce qui est du facteur d’utilisabilité. À notre connaissance ce dernier résultat est nouveau dans le domaine et mériterait d’être confirmé par de futures recherches.

Des échanges avec les enseignant·e·s leur ont permis de partager leur expérience de l’utilisation/prise en main par les élèves de l’application AppLINOU vécue sur le terrain, nous permettant d’apporter des éléments de discussion à ces observations. Un 1er élément d’explication serait que l’intervention était lourde pour tous les enseignant·e·s, mais beaucoup plus lourde pour les enseignant·e·s de REP. En effet, compte-tenu de l’hétérogénéité des élèves et du retard dans les apprentissages de certain·e·s, mettre en place le dispositif s’est avéré plus difficile. Un 2nd élément d’explication serait que les qualités pédagogiques implémentées restent insuffisantes pour faire progresser les élèves en REP. Nous avons fait le choix de favoriser un travail en autonomie par les élèves, mais la présence systématique d’un adulte pourrait s’avérer plus bénéfique pour certains publics. Ce dernier peut ainsi faire plus d’étayage et motiver les élèves.

Question 3 : À notre connaissance, peu d’études mettent en lien l’acceptance d’un outil par les enseignant·e·s et les performances des élèves, notamment au préscolaire. Les résultats de Nagy (2018) suggèrent qu’une bonne acceptance favorise l’usage d’un outil et que, plus cet outil est utilisé, plus les compétences travaillées par cet outil sont entraînées. Ces observations sont en accord avec nos résultats. Une bonne acceptance de AppLinou par les enseignant·e·s est liées à de bonnes performances des élèves en NE et LE, et ce plus spécifiquement pour le facteur « utilisabilité » de l’acceptance de notre questionnaire. Ce facteur correspond à la perception des qualités pédagogiques de l’application par les enseignants. Cette perception, si elle est positive, augmenterait les performances des élèves.

Que dois-je retenir de cette étude pour ma pratique ?

  • La collaboration entre enseignant·e·s et chercheur·euse·s est essentielle afin de développer des applications éducatives adaptées à la classe. Cette pratique doit être encouragée. Notre démarche de co-conception a reçu des retours enthousiastes de la part des enseignant·e·s de notre groupe et a permis des échanges riches entre les différents acteurs. De plus, elle a permis de développer une application bien acceptée dans les classes.
  • Créer une application éducative est un exercice complexe qui nécessite d’être conscient·e de toutes les possibilités offertes par la tablette. Cette étude a permis de se questionner sur les fonctionnalités pédagogiques qui peuvent être efficaces ou non sur la tablette. L’outil en lui-même est facile d’utilisation, mais la présence de consignes orales ou de feedbacks correctifs et évaluatifs constituent des plus-values pour l’utilisation de l’application par des jeunes enfants. Il convient de penser à d’autres fonctionnalités centrées sur l’enseignant·e afin de rendre l’application encore plus utile pour l’enseignement.
  • Les élèves scolarisé·e·s en REP et en REP+ doivent bénéficier d’une attention particulière. Dans le cadre du projet LINUMEN, nous avons constaté que ces élèves avaient besoin d’étayages spécifiques et d’un accompagnement plus important que les élèves des autres écoles lors de l’utilisation d’un outil numérique a priori conçu pour un usage en autonomie.
  • D’après les résultats de notre recherche, une attitude positive vis-à-vis de AppLINOU est corrélée avec un meilleur apprentissage des élèves en LE et NE. Ces résultats sont nouveaux et importants car l’acceptance est peu étudiée chez les enseignant·e·s, de même que l’influence de l’acceptance sur les apprentissages. Une exploration de cette question permet de mieux comprendre les mécanismes d’adoption du numérique en classe, mais aussi si l’attitude de l’enseignant vis-à-vis du numérique a une influence sur les apprentissages des élèves dans ce contexte.

Références

Alexandre, B., Reynaud, E., Osiurak, F. et Navarro, J. (2018). Acceptance and acceptability criteria : a literature review. Cognition, Technology & Work, 20(2), 165-177. https://doi.org/10.1007/s10111-018-0459-1

Avila, E. C. et Lavadia, M. K. S. (2019). Investigation of the acceptability and effectiveness of academic podcasts to college students’ scholastic performance in science. Indian Journal of Science and Technology, 12(34), 1-8. https://doi.org/10.17485/ijst/2019/v12i34/127382

Davis, F. D. (1993). User acceptance of information technology: system characteristics, user perceptions and behavioral impacts. International Journal of Man-Machine Studies, 38(3), 475-487. https://doi.org/10.1006/imms.1993.1022

De Muth, J. E. et Bruskiewitz, R. H. (2006). A comparison of the acceptability and effectiveness of two methods of distance education: CD-ROM and audio teleconferencing. American Journal of Pharmaceutical Education, 70(1). https://doi.org/10.5688/aj700111

Granić, A. et Marangunić, N. (2019). Technology acceptance model in educational context: A systematic literature review. British Journal of Educational Technology, 50(5), 2572-2593. https://doi.org/10.1111/bjet.12864

Hirsh-Pasek, K., Zosh, J. M., Golinkoff, R. M., Gray, J. H., Robb, M. B. et Kaufman, J. (2015). Putting education in “educational” apps: Lessons from the science of learning. Psychological Science in the Public Interest, 16(1), 3-34. https://doi.org/10.1177/1529100615569721

Hoareau, L., Tazouti, Y., Dinet, J., Thomas, A., Luxembourger, C., Hubert, B., Fischer, J.-P. et Jarlégan, A.(2020). Co-designing a new educational tablet app for preschoolers. Computers in the Schools, 37(4), 234-252. https://doi.org/10.1080/07380569.2020.1830253

Hoareau, L., Thomas, A., Tazouti, Y., Dinet, J., Luxembourger, C. et Jarlégan, A. (2021). Beliefs about digital technologies and teachers’ acceptance of an educational app for preschoolers. Computers & Education, 104264. https://doi.org/10.1016/j.compedu.2021.104264

Judge, S., Floyd, K. et Jeffs, T. (2015). Using mobile media devices and apps to promote young children’s learning. Dans K. L. Heider et M. Renck Jalongo (dir.), Young children and families in theinformation age (p. 117-131). Springer.

Kucirkova, N. (2017). i RPD–A framework for guiding design-based research for iPad apps. British Journal of Educational Technology, 48(2), 598-610. https://doi.org/10.1111/bjet.12389

Lombard, J., Amadieu, F., Bråten, I. et Van De Leemput, C. (2018). Reading multiple documents on tablet: Effects of applications and strategic guidance on performance and acceptance. Dans International Conference on Learning and Collaboration Technologies (p.157-169). Springer. https://doi.org/10.1007/978-3-319-91743-6_12

Nagy, J. T. (2018). Evaluation of online video usage and learning satisfaction: An extension of the technology acceptance model. International Review of Research in Open and Distributed Learning, 19(1). https://doi.org/10.19173/irrodl.v19i1.2886

Papadakis, S., Kalogiannakis, M. et Zaranis, N. (2018). The effectiveness of computer and tablet assisted intervention in early childhood students’ understanding of numbers. An empirical study conducted in Greece. Education and Information Technologies, 23(5), 1849-1871. https://doi.org/10.1007/s10639-018-9693-7

Patchan, M. M. et Puranik, C. S. (2016). Using tablet computers to teach preschool children to write letters: Exploring the impact of extrinsic and intrinsic feedback. Computers & education, 102, 128-137. https://doi.org/10.1016/j.compedu.2016.07.007

Piotrowski, J. T. et Krcmar, M. (2017). Reading with hotspots: Young children’s responses to touch screen stories. Computers in Human Behavior, 70, 328-334. https://doi.org/10.1016/j.chb.2017.01.010

Schacter, J. et Jo, B. (2016). Improving low-income preschoolers mathematics achievement with MathShelf, a preschool tablet computer curriculum. Computers in Human Behavior, 55, 223-229. https://doi.org/10.1016/j.chb.2015.09.013

Schroeder, E. L. et Kirkorian, H. L. (2016). When seeing is better than doing: Preschoolers’ transfer of STEM skills using touchscreen games. Frontiers in Psychology, 7, 1377. https://doi.org/10.3389/fpsyg.2016.01377

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Zipke, M. (2017). Preschoolers explore interactive storybook apps: The effect on word recognition and story comprehension. Education and Information Technologies, 22(4), 1695-1712. https://doi.org/10.1007/s10639-016-9513-x7

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Thèses

Influence de la motricité fine et des habiletés rythmiques dans l’apprentissage du langage écrit

Margaux LÊ

Niveaux

Du CE2 au CM2

 

 

Public

Enseignants d’élémentaire

 

 

Contact

Margaux LÊ — Voir ses publications

Laboratoire CeRCA

Action/Projet associé(e)

Ressource(s) associée(s)

À quelles questions cette étude tente-t-elle de répondre ?

L’influence des habiletés langagières, comme par exemple les compétences de traitement phonologique, sur l’apprentissage de la lecture et de l’écriture a été rapportée dans de nombreux travaux mais d’autres études plus récentes suggèrent que des habiletés non-langagières pourraient également jouer un rôle dans ces apprentissages. Ce travail de recherche s’inscrit dans la continuité de ces travaux et vise à mieux comprendre l’implication de deux de ces habiletés — la motricité fine et les habiletés rythmiques — dans l’apprentissage du langage écrit chez des élèves du CE2 au CM2. Plusieurs objectifs peuvent être distingués.

  • Objectif 1 : Clarifier les mécanismes cognitifs expliquant les relations entre habiletés langagières et non-langagières chez les élèves sans difficulté.
  • Objectif 2 : Examiner l’influence des difficultés motrices/rythmiques dans les troubles de l’apprentissage du langage écrit.
  • Objectif 3 : Évaluer les bénéfices d’un entraînement en classe ciblant ces habiletés non-langagières sur l’apprentissage du langage écrit chez les élèves présentant ou non des difficultés d’apprentissage.

Pourquoi ces questions sont-elles pertinentes ?

Question 1 : De récentes études rapportent que les habiletés motrices et rythmiques évaluées en maternelle prédisent le niveau de langage écrit ultérieur (Cameron et al., 2012 ; Ozernov-Palchik et al.,2018). Cependant, il est nécessaire d’expliquer ces relations et plusieurs hypothèses ont été proposées. Par exemple, les compétences motrices pourraient faciliter l’apprentissage de l’écrit de par leur implication dans l’automatisation du geste d’écriture, une écriture manuscrite plus automatisée permettant de consacrer plus de ressources attentionnelles au traitement du langage lors de l’écriture d’un mot ou d’un texte (Suggate et al., 2016). Les habiletés rythmiques seraient quant à elles impliquées dans la segmentation du flux de la parole et jouerait un rôle crucial dans le développement de la conscience phonologique, l’un des principaux prédicteurs de l’émergence de la lecture et de l’orthographe (Ozernov-Palchik et al., 2018). Enfin, les effets de la motricité fine et du traitement du rythme sur le langage écrit pourraient également être expliqués par les fonctions exécutives (par exemple, l’inhibition, la mémoire de travail, etc.) qui jouent un rôle important dans la réussite scolaire (Cameron et al., 2012). Cependant, ces différentes hypothèses explicatives doivent être testées et confrontées permettant ainsi d’apporter de nouveaux éléments théoriques pour mieux comprendre les relations entre habiletés langagières et non-langagières et affiner la compréhension des facteurs impliqués dans l’apprentissage de la lecture et de l’écriture.

Question 2 : Un nombre grandissant de travaux rapportent que les habiletés motrices et rythmiques sont fréquemment altérées chez les élèves présentant une dyslexie (Jover et al., 2013 ; Thomson et al.,2013). Par exemple, le trouble développemental de la coordination motrice (dyspraxie) est associé à la dyslexie dans 10 à 70 % des cas (Jover et al., 2013). Pourtant, les mécanismes expliquant la co-occurrence de ces troubles sont encore mal compris. Les interactions entre des difficultés langagières et non-langagières doivent également être mieux étudiées. Par exemple, chez les élèves dyslexiques, la présence de difficultés motrices et/ou rythmiques associées pourrait majorer les difficultés d’apprentissage de la lecture et/ou de l’écriture. L’étude des habiletés non-langagières dans les troubles du langage écrit est donc primordiale pour mieux comprendre l’étiologie de ces troubles et identifier de potentiels facteurs aggravants.

Question 3 : La majorité des travaux précités s’appuient sur des études corrélationnelles, qui ne permettent pas de prouver l’efficacité d’une intervention ciblant les habiletés non-langagières pour soutenir l’apprentissage du langage écrit. Actuellement, peu d’études interventionnelles se sont intéressées à cette question et elles présentent plusieurs limites. D’une part, les études évaluant les bénéfices d’entraînements rythmiques sur l’apprentissage de la lecture intègrent des exercices langagiers (Bhide et al., 2013) : il est donc difficile d’identifier la plus-value spécifique de l’entraînement au rythme sur le développement des compétences en lecture. D’autre part, les bénéfices d’un entraînement à la motricité fine n’ont quant à eux pas été étudiés à notre connaissance. Ainsi, une évaluation de l’efficacité de ce type d’entraînement sur le développement des compétences en lecture et en écriture pourrait non seulement conduire à une adaptation pertinente des pratiques pédagogiques actuelles mais aussi proposer de nouvelles pistes de remédiations pour les élèves présentant des troubles de l’apprentissage du langage écrit.

Quelle méthodologie de recherche a-t-on utilisée ?

Plusieurs études ont été menées dans le cadre de ce projet pour répondre à ces questions de recherche. Au total, 25 classes de CE2 et 17 classes de CM1 réparties dans 22 écoles de l’académie de Poitiers ont été impliquées dans le projet.

Question 1 : La première étude a été réalisée afin de mieux comprendre les mécanismes explicatifs des liens entre habiletés motrices et rythmiques et le langage écrit. Pour cela, 278 élèves de CE2 ont réalisé différentes tâches évaluant les habiletés motrices et rythmiques, les compétences associées au langage écrit (lecture et orthographe de mots, compréhension écrite et rédaction de texte) ainsi que différents médiateurs potentiels : les fonctions exécutives (mémoire de travail, inhibition et flexibilité mentale), l’écriture manuscrite et les compétences phonologiques. Les tests utilisés étaient en majorité issus de batteries standardisées (motricité : M-ABC ; langage écrit et compétences phonologiques : Batterie Analytique du Langage Ecrit ; fonctions exécutives : TEA-Ch, NEPSY-II, WISC-V, WNV). En l’absence de tests existants, les habiletés rythmiques ont été évaluées à l’aide d’une tâche de synchronisation à un rythme développée par Wolff (2002). Cette étude ne se focalisant que sur les élèves sans difficulté, les élèves présentant des difficultés d’apprentissage du langage écrit (c’est-à-dire, ceux présentant des scores déficitaires sur les épreuves langagières) ont été exclus de cette première étude. Au total, 239 participants ont été inclus pour les analyses. Des modèles statistiques ont ensuite été utilisés pour mettre en relations ces différentes habiletés et tester différentes hypothèses explicatives des liens entre motricité, rythme et langage écrit.

Question 2 : La deuxième étude visait à mieux comprendre le rôle des habiletés motrices et rythmiques dans les troubles de l’apprentissage du langage écrit. Pour cela, les habiletés non-langagières de 32 élèves présentant des difficultés d’apprentissage du langage écrit et de 32 élèves sans difficulté, tous issus de la cohorte de l’étude précédente, ont été comparées. Parmi les élèves en difficulté, différents sous-groupes ont également été distingués et comparés (faibles compétences motrices ou rythmiques vs compétences motrices ou rythmiques élevées) : nous nous attendions à trouver des difficultés en lecture et en écriture plus importantes chez les élèves présentant des difficultés motrices et/ou rythmiques associées.

Question 3 : La troisième étude nous a permis d’évaluer les bénéfices d’un entraînement moteur sur le développement des compétences en lecture et en écriture. L’entraînement était basé sur la pratique d’un jeu vidéo sur tablette, développé spécialement dans le cadre du projet DysApp. L’outil proposait différentes activités de motricité fine sollicitant le contrôle visuo-moteur, la dextérité manuelle et le déliement digital (par exemple, toucher des cibles le plus vite possible sur un écran avec les différents doigts de la main). Une étude randomisée contrôlée a été menée auprès de 147 élèves de CM1 sans difficulté d’apprentissages afin d’évaluer l’impact de l’utilisation de ce jeu sur (1) les compétences motrices et (2) le développement des compétences en lecture et en écriture. Les participants étaient répartis aléatoirement dans deux groupes : le groupe « entraîné » bénéficiait de l’intervention cible (jeu de motricité) et le groupe « contrôle » bénéficiait d’un autre type d’intervention (jeux mathématiques sur tablette). L’ensemble des participants a réalisé 12 séances de 20 minutes de jeu en petits groupes à raison de 2 séances par semaines. Avant et après la phase d’entraînement, les élèves ont réalisé plusieurs tâches évaluant leurs habiletés motrices (dextérité unimanuelle, coordination bimanuelle, séquences motrices) et leurs compétences en langage écrit (tâches de lecture de mots, dictée de mots et texte, et compréhension écrite) afin d’évaluer l’évolution de ces compétences pour les deux groupes. Nous nous attendions à observer une plus grande amélioration de l’ensemble des compétences évaluées chez les élèves du groupe « entraîné » par rapport aux élèves du groupe « contrôle ».

Quels résultats a-t-on obtenus ?

Question 1 : Les résultats de la première étude révèlent qu’en CE2 les habiletés motrices et rythmiques ont un effet sur l’ensemble des dimensions du langage écrit évaluées dans l’étude (lecture, orthographe, compréhension et rédaction de texte). Plus précisément, les résultats des modèles statistiques permettent d’identifier différents facteurs expliquant ces relations :

  • L’effet de la motricité sur le langage écrit est expliqué par les fonctions exécutives et l’automatisation de l’écriture manuscrite. De meilleures compétences motrices faciliteraient le développement du fonctionnement exécutif et l’automatisation du geste d’écriture, qui influenceraient en retour l’apprentissage de la lecture et de l’écriture.
  • À l’inverse, l’effet du traitement rythmique sur l’apprentissage de l’écrit est exclusivement sous-tendu par les fonctions exécutives. Nos résultats suggèrent que de meilleures capacités à traiter les stimuli rythmiques pourraient faciliter le développement du fonctionnement exécutif, lui-même impliqué dans la réussite scolaire. Par contre, les compétences phonologiques n’expliquent pas la relation entre habiletés rythmiques et langage écrit chez des élèves de CE2, contrairement à ce qui avait été montré chez les élèves plus jeunes (Ozernov-Palchik et al., 2018).

Question 2 : En accord avec des travaux antérieurs, les résultats de la deuxième étude montrent tout d’abord que les élèves présentant des difficultés en lecture et en orthographe sont moins précis pour se synchroniser sur un rythme régulier. Ces difficultés rythmiques ne sont toutefois pas systématiques :certains élèves en difficulté obtiennent des résultats similaires à ceux d’élèves sans difficulté du même âge. Aucune différence significative n’est retrouvée entre les deux groupes sur les tâches de motricité. Par ailleurs, la comparaison de différents sous-groupes réalisée dans un second temps indique qu’au sein de la population d’élèves en difficulté, la présence de plus faibles habiletés motrices et/ou rythmiques s’accompagne de plus faibles performances sur les tâches d’orthographe lexicale. Les résultats de cette étude suggèrent donc que les difficultés motrices et rythmiques pourraient entraver le développement des compétences en orthographe lexicale et majorer des difficultés préexistantes.

Question 3 : La troisième étude visait à évaluer les bénéfices de la pratique d’un jeu vidéo sur tablette entraînant les habiletés motrices sur le langage écrit. Les analyses révèlent que suite à l’entraînement, les élèves du groupe « entraîné » se sont significativement plus améliorés que les élèves du groupe « contrôle » sur les tâches de séquence motrice et d’orthographe de mots. L’ensemble de ces résultats soutient donc l’hypothèse d’un bénéfice d’un entraînement moteur basé sur la pratique d’un jeu vidéo. Cependant, le bénéfice de cet entraînement n’est retrouvé que sur certaines tâches de motricité fine (séquence motrice) et de langage écrit (orthographe de mots) mais pas sur les autres mesures motrices (tâches de coordination bimanuelle et dextérité unimanuelle) ou langagières (tâche de lecture de mots, dictée de phrases et compréhension écrite). D’autres travaux doivent être réalisés pour mieux comprendre ce résultat. Enfin, il est nécessaire de tester si ce type d’entraînement peut également être efficace chez des élèves présentant un trouble neurodéveloppemental comme une dyslexie et/ou un trouble développemental de la coordination.

Que dois-je retenir de cette étude pour ma pratique ?

  • La motricité fine et les habiletés rythmiques sont en lien avec différentes dimensions du langage écrit (lecture de mots, orthographe de mots, compréhension écrite et rédaction de texte) en CE2 et CM1.
  • Les effets des habiletés motrices et rythmiques sur l’apprentissage du langage écrit sont expliqués d’une part par l’automatisation du geste d’écriture et d’autre part, par les fonctions exécutives, qui sont impliquées dans la lecture et l’écriture, mais également, de façon plus générale dans la réussite scolaire.
  • Chez les élèves en difficulté, une altération des compétences motrices et rythmiques s’accompagne d’une majoration des difficultés en orthographe lexicale. Ceci suggère qu’une prise en charge ciblant à la fois les habiletés langagières et non-langagières pourrait être utile à ces élèves.
  • Un entraînement des habiletés motrices basé sur la pratique d’un jeu vidéo permet d’améliorer certaines compétences motrices et langagières (orthographe) chez les élèves de CM1. Cependant, d’autres études sont nécessaires pour confirmer les bénéfices de ce type d’intervention sur le langage écrit.

Références

Bhide, A., Power, A. et Goswami, U. (2013). A rhythmic musical intervention for poor readers: A comparison of efficacy with a letter-based intervention. Mind, Brain, and Education, 7(2), 113-123. https://doi.org/10.1111/mbe.12016

Cameron, C. E., Brock, L. L., Murrah, W. M., Bell, L. H., Worzalla, S. L., Grissmer, D. et Morrison, F. J. (2012). Fine motor skills and executive function both contribute to kindergarten achievement. Child Development, 83(4), 1229-1244. https://doi.org/10.1111/j.1467-8624.2012.01768.x

Jover, M., Ducrot, S., Huau, A., Bellocchi, S., Brun-Henin, F. et Mancini, J. (2013). Motor disorders indyslexic children: A review and perspectives. Enfance, (4), 323-347.

Ozernov-Palchik, O., Wolf, M. et Patel, A. D. (2018). Relationships between early literacy and nonlinguistic rhythmic processes in kindergarteners. Journal of Experimental Child Psychology, 167, 354-368. https://doi.org/10.1016/j.jecp.2017.11.009

Suggate, S., Pufke, E. et Stoeger, H. (2016). The effect of fine and grapho-motor skill demands on preschoolers’ decoding skill. Journal of Experimental Child Psychology, 141, 34-48. https://doi.org/10.1016/j.jecp.2015.07.012

Thomson, J. M., Leong, V. et Goswami, U. (2013). Auditory processing interventions and developmental dyslexia : A comparison of phonemic and rhythmic approaches. Reading and Writing, 26(2), 139-161. https://doi.org/10.1007/s11145-012-9359-6

Wolff, P. H. (2002). Timing precision and rhythm in developmental dyslexia. Reading and Writing, 15(1),179-206. https://doi.org/10.1023/A:10138807239255

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Thèses

Conception et évaluation d’EVASION, un logiciel éducatif d’entraînement des capacités d’attention visuelle impliquées en lecture

Svetlana MEYER

Niveaux

Du CP au collège

 

 

Public

Enseignant·e·s d’élémentaire, professeur·e·s de collège

 

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Svetlana MEYER — Voir ses publications

 

Laboratoire LPNC

Action/Projet associé(e)

Ressource(s) associée(s)

À quelles questions cette étude tente-t-elle de répondre ?

D’année en année, l’éducation nationale fait le constat qu’une proportion importante d’élèves présente un niveau de lecture qui n’est pas suffisant pour constituer un socle solide sur lequel se reposer pour construire l’ensemble des autres apprentissages. La question est donc de savoir comment faciliter l’apprentissage de la lecture et éviter que certains élèves ne prennent du retard dans cet apprentissage ? On sait déjà que certains entraînements sont efficaces pour améliorer la qualité de la lecture (recommandations CNESCO, 2016). Lire sans erreur est un des objectifs de l’apprentissage de la lecture, mais un autre enjeu majeur de cet apprentissage est d’amener les élèves à une lecture fluente, à la fois précise et fluide.

Ce travail de recherche avait deux objectifs principaux : 1) concevoir un nouvel entraînement permettant d’améliorer la fluence en lecture et 2) tester l’efficacité de cet entraînement par le biais d’une expérimentation menée en classe sous la seule supervision des enseignants. Pour répondre à ces objectifs, nous avons ciblé une dimension, l’attention visuelle, qui est fortement impliquée dans la fluence en lecture (LaBerge et Samuels, 1974 ; Valdois, 2020 ; Valdois et al., 2021 ; Valdois et al., 2019). En préalable, nous devions répondre aux questions suivantes :

Q1 : Quels sont à ce jour les entraînements qui ont fait leurs preuves sur les dimensions de l’attention visuelle impliquées dans la lecture ?

Q2 : Quelle forme prendrait un logiciel d’entraînement qui soit à la fois efficace et compatible avec les contraintes de la classe ?

Q3 : Le logiciel d’entraînement proposé est-il efficace sur le terrain par rapport à un logiciel contrôle qui n’entraîne ni l’attention visuelle ni la lecture ?

Pourquoi ces questions sont-elles pertinentes ?

Absente des programmes scolaires, le rôle de l’attention visuelle dans l’apprentissage de la lecture est largement documenté dans la littérature scientifique. En effet, plusieurs études ont montré que les enfants qui ont de bonnes capacités d’attention visuelle sont capables d’identifier davantage de lettres simultanément dans le mot. Cela leur permet de reconnaître rapidement des unités orthographiques plus longues (syllabes ou mots entiers) et donc de lire plus vite et plus efficacement (Valdois, 2020). Il est ainsi montré que les enfants qui ont un empan visuo-attentionnel plus élevé en fin de grande section de maternelle lisent avec moins d’erreur et plus rapidement en fin de CP (Valdois et al., 2019). Plus généralement et quel que soit le niveau de classe ou l’âge des individus, de meilleures capacités d’attention visuelle sont associées à une plus grande fluence en lecture (Bosse et Valdois, 2009).

Quels sont les entraînements de l’attention visuelle qui ont fait leur preuve ?
Plusieurs études menées auprès de populations d’enfants dyslexiques ont montré que l’on pouvait entraîner efficacement leurs capacités d’attention visuelle et que cela se traduisait par une meilleure fluence en lecture (Meyer et al., 2017 ; Zoubrinetzky et al., 2019). L’entraînement consistait à demander aux enfants de traiter des séquences de lettres (ou d’autres stimuli visuels) de plus en plus longues en un temps de plus en plus court. On sait également que la pratique des jeux vidéo d’action améliore les capacités d’attention visuelle (Altarelli et Bavelier, 2018), conduisant à des effets positifs sur la fluence en lecture (Antzaka et al., 2017 ; Franceschini et al., 2013). Nous nous sommes inspirés de ces travaux pour concevoir notre nouveau logiciel d’entraînement, EVASION.

Quel type d’entraînement proposer pour qu’il soit adapté aux contraintes de la classe ?
Les enseignants sont le plus souvent confrontés à des classes très hétérogènes. Nous avons donc conçu le logiciel EVASION comme un outil entraînant au traitement visuel des lettres et au déploiement de l’attention visuelle à travers 4 mini-jeux d’action. EVASION permet aussi un entraînement personnalisé. D’une part, EVASION est doté d’un algorithme adaptatif permettant d’adapter la progression des exercices aux besoins de chaque enfant ; d’autre part, le logiciel est suffisamment ludique, attrayant et guidé pour être utilisé par les élèves en quasi autonomie. Ainsi, l’enseignant pourra choisir de proposer EVASION à une partie des élèves de sa classe qui travailleront en autonomie et bénéficieront d’une progression personnalisée. Cela libèrera du temps pour organiser s’il le souhaite, des activités en plus petit groupe pour les autres élèves. Par ailleurs, une interface à destination des enseignants a été développée pour que l’enseignant puisse avoir des informations sur le travail réalisé par chaque élève lors des entraînements.

Le logiciel d’entraînement est-il efficace ?
Proposer à ses élèves des séances d’entraînement en classe sur un nouveau logiciel n’a de sens que s’il a été préalablement démontré que cet entraînement est efficace. L’enseignant doit, en effet, être rassuré sur le fait que le temps passé par les élèves sur le logiciel éducatif est un temps utile. Nous devions donc évaluer l’efficacité d’EVASION en condition réelle, c’est-à-dire dans une situation de classe habituelle sous la seule supervision des enseignants. On sait par ailleurs que le simple fait de participer à une expérimentation et de travailler sur tablette peut induire une plus grande motivation des élèves conduisant à une amélioration des performances sans que cela soit dû aux dimensions entraînées. Pour mesurer réellement l’efficacité d’un jeu, il est donc nécessaire de comparer la progression de deux groupes : un groupe entraîné sur le jeu cible et un groupe contrôle qui s’entraîne dans les mêmes conditions (même support, même durée) mais sur un jeu totalement différent, en l’occurrence ici un jeu sans rapport ni avec l’attention visuelle ni avec la lecture. Enfin, vérifier l’efficacité d’un entraînement nécessite d’effectuer des évaluations avant et après entraînement. Il faut en effet vérifier que les groupes affectés à des entraînements différents avaient, avant entraînement, des aptitudes cognitives similaires qui prédiraient une évolution comparable dans le temps. La mesure de leurs aptitudes après entraînement permet de vérifier si le groupe entraîné sur le logiciel cible a davantage progressé en lecture que le groupe entraîné sur le logiciel contrôle.

Quelle méthodologie de recherche a-t-on utilisée ?

Le premier enjeu de ce travail de recherche consistait à concevoir des exercices appropriés pour entraîner l’attention visuelle. Pour cela, nous avons effectué une synthèse des recherches scientifiques concernant l’attention visuelle et son rôle en lecture (Meyer et al., 2018) et des travaux sur les jeux vidéo d’action de façon à dégager les principes actifs de ces jeux qui ont pour effet d’améliorer les capacités d’attention visuelle (Altarelli et Bavelier, 2018). Nous avons ensuite développé un nouveau logiciel, EVASION, qui propose, à travers 4 mini-jeux, d’entraîner les capacités attentionnelles des élèves. Chaque mini-jeu répond aux principes des jeux vidéo d’action et propose des activités de recherche de séquences cibles. Pour augmenter la difficulté du jeu et la charge attentionnelle, nous faisons varier (1) la longueur des séquences cibles à traiter, (2) la proximité visuelle entre ces séquences et les séquences non-cibles et (3) la vitesse de défilement à l’écran. Le logiciel est doté d’un algorithme adaptatif qui permet d’adapter la progression des exercices aux besoins de chaque élève. L’algorithme détermine en temps réel les niveaux d’exercices qui ont une probabilité d’être réussis par l’enfant de 75 % (Wilson et al., 2006). Ces exercices sont suffisamment difficiles pour lui offrir une marge de progression et suffisamment faciles pour ne pas entraîner de démotivation. Le logiciel offre ainsi un entraînement personnalisé.

Le second enjeu de ce travail de recherche était de déployer les jeux dans des classes et d’évaluer leur efficacité. Cette partie de l’étude a été mise en œuvre dans le cadre du projet FLUENCE (www.fluence.cnrs.fr). 722 élèves de CP et leurs enseignants, relevant de 52 classes et 35 écoles de l’académie de Grenoble, ont participé à l’expérimentation. Les classes ont été scindées en deux groupes de niveau équivalent en début de CP. Nous avons ensuite proposé l’entraînement EVASION au premier groupe et un entraînement sans rapport avec la lecture au second groupe. Ce second entraînement utilisait le logiciel LUCIOLE également développé dans le cadre du projet FLUENCE, et portait sur la compréhension de l’anglais oral. Il était recommandé aux enseignants des deux groupes de proposer 3séances d’entraînement par semaine, à raison de 20 min par séance pour une durée de 10 semaines (soit un total de 10 h d’entraînement). Les entraînements des deux groupes étaient effectués sur tablettes.
Des évaluations étaient proposées avant (pré-test) et après entraînement (post-test), soit en début (novembre) et en fin (mai-juin) de CP. En pré-test, nous avons évalué les prédicteurs de l’apprentissage de la lecture (capacité d’induction et de déduction, langage oral, connaissance du nom des lettres, aptitudes phonologiques et visuo-attentionnelles). Les évaluations effectuées après entraînement avaient pour but d’évaluer si les élèves entraînés sur EVASION avaient de meilleures performances en fin d’année que les élèves entraînés sur l’anglais oral. Nous nous attendions notamment à ce qu’ils aient davantage progressé sur les épreuves d’attention visuelle et sur les épreuves de lecture.

Quels résultats a-t-on obtenus ?

Les premiers résultats de cette expérimentation écologique — c’est-à-dire, menée dans le contexte de la classe sous la supervision des seuls enseignants — à grande échelle n’ont pas été conformes à nos attentes (Mandin et al., 2021c ; Mandin et al., 2021a). Ni les capacités d’attention visuelle, ni le niveau de lecture n’avaient davantage progressé dans le groupe entraîné avec EVASION comparativement au groupe contrôle. Il pourrait être tentant d’en conclure que le logiciel n’est pas efficace pour entraîner les dimensions de l’attention visuelle impliquées en lecture.

Or des analyses supplémentaires nous ont permis d’identifier deux facteurs qui pouvaient être responsables de cette absence d’effet sans remettre nécessairement en question le bien-fondé de ce type d’entraînement. D’une part, nous avons constaté que le temps d’entraînement effectif en classe était bien inférieur au temps préconisé : le temps d’entraînement variait beaucoup d’un élève et d’une classe à l’autre, certains élèves ne s’étant entraînés que 2 ou 3 h au lieu des 10 h attendues. Un résultat encourageant était toutefois que les enfants qui avaient effectué le plus d’heures d’entraînement avaient davantage amélioré leurs capacités visuo-attentionnelles que ceux qui s’étaient le moins entraînés. Il est donc possible que l’absence d’effet sur l’attention visuelle et la lecture puisse en partie s’expliquer par le non-respect du temps d’entraînement. D’autre part, une analyse des taux de réussites des élèves sur chaque mini-jeu révèle que les configurations de jeu conçues pour être les plus difficiles restaient trop faciles pour un certain nombre d’élèves. Le logiciel souffrait donc d’un problème de calibration qui ne permettait pas d’offrir, à tous les élèves, une marge de progression suffisante. Nous avons tiré profit de ces analyses. D’une part, le logiciel devait être modifié de façon à donner à l’enfant une information très explicite sur son avancée dans le jeu et à accroître sa motivation à poursuivre pour toute la durée d’entraînement demandée. D’autre part, les échelles de difficulté définissant les exercices possibles devaient être ajustées. Plusieurs pistes d’amélioration ont été identifiées : passer de séquences connues (par exemple, « ain ») à des séquences non connues (par exemple, « rvs »), allonger la taille des séquences possibles, augmenter le nombre de séquences, cibles ou non, simultanément présentes à l’écran et définir des vitesses de défilement plus importantes. De cette façon, le logiciel adaptatif aurait davantage de latitude pour proposer des exercices appropriés même pour les élèves qui étaient dès le départ très performants. Ce travail de recherche s’est conclu par la proposition de ces modifications et a permis le développement d’une version améliorée du logiciel EVASION que nous appellerons EVASION-2.

Dans le cadre plus général du projet FLUENCE, EVASION-2 a ensuite été proposé à un nouveau groupe d’élèves de CP selon un protocole très comparable à celui précédemment décrit. 746 élèves, recrutés sur le territoire de Mayotte, ont participé à l’étude. Comme précédemment, un groupe d’élèves devait utiliser EVASION-2 et un autre groupe le logiciel contrôle d’entraînement à la compréhension de l’anglais oral (LUCIOLE). Pour des questions techniques, le logiciel contrôle d’anglais n’a pas pu être livré dans les temps. Les performances en post-test du groupe entraîné sur EVASION-2 ont donc été comparées à celles d’un groupe non entraîné. Les résultats montrent que s’entraîner sur EVASION-2 améliore les capacités d’attention visuelle des élèves (Mandin et al., 2021b ; Mandin et al., 2021a) ; la nouvelle version du logiciel est de ce fait efficace pour l’entraînement de la fonction visée. Plus important, les résultats montrent également que les enfants entraînés ont une plus grande fluence de lecture enfin de CP comparativement à l’autre groupe, et qu’ils ont également progressé en orthographe lexicale. Non seulement, le groupe entraîné lit plus vite et plus précisément à la fois des textes et des listes de mots connus et de mots inventés, mais il est également capable de mieux orthographier les mots dictés que le groupe contrôle. Un autre résultat important est que là encore les performances en post-test sont fonction du temps d’entraînement. Même si des tendances se dessinent dans le bon sens chez les élèves les moins entraînés, ce sont les élèves qui ont effectué un entraînement d’au moins 6 h qui présentent des améliorations significatives. Globalement, EVASION-2 permet d’entraîner l’attention visuelle, ce qui a des conséquences sur les apprentissages à la fois de la lecture et de l’orthographe.

Que dois-je retenir de cette étude pour ma pratique ?

  • L’attention visuelle est un déterminant très important de l’apprentissage de la lecture. Les élèves qui ont des capacités d’attention visuelle élevées sont capables d’identifier davantage de lettres dans les mots en une seule fixation, ce qui leur permet de traiter des unités orthographiques plus larges, comme les graphèmes longs (« oin » par exemple), les syllabes et/ou le mot entier. Les unités longues sont identifiées rapidement et sans erreur ce qui conduit plus rapidement à une lecture fluente.
  • Entraîner l’attention visuelle en début de CP améliore l’apprentissage de la lecture. Les résultats du projet FLUENCE suggèrent qu’un entraînement précoce de l’attention visuelle devrait contribuer à prévenir les difficultés d’apprentissage de la lecture. Nous avons montré que l’entraînement encours de CP favorise cet apprentissage. Des expérimentations sont en cours pour vérifier si un entraînement proposé encore plus précocement, en grande section de maternelle, a également un effet positif sur l’apprentissage de la lecture l’année suivante (à suivre sur www.fluence.cnrs.fr).
  • EVASION-2 constitue un outil numérique efficace dont les enseignants pourraient s’emparer pour entraîner l’attention visuelle chez leurs élèves. Nous espérons que le logiciel sera mis à disposition des enseignants sur une plateforme dédiée nationale ou locale au niveau des rectorats, permettant un accès gratuit au bénéfice de tous les élèves.

Références

Altarelli, I. et Bavelier, D. (2018). Les jeux vidéo d’action : des effets sur la cognition et sur le cerveau aux applications potentielles à l’éducation. A.N.A.E., 157(30).

Antzaka, A., Lallier, M., Meyer, S., Diard, J., Carreiras, M. et Valdois, S. (2017). Enhancing reading performance through action video games: The role of visual attention span. Scientific Reports, 7(1), 1-10. https://doi.org/10.1038/s41598-017-15119-9

Bosse, M.-L. et Valdois, S. (2009). Influence of the visual attention span on child reading performance: across-sectional study. Journal of Research in Reading, 32(2), 230-253.

CNESCO. (2016). Lire, Comprendre, Apprendre : comment soutenir le développement des compétencesen lecture ? https://disciplines.ac-toulouse.fr/lettres-histoire-geographie/sites/lettres-histoire-geographie/files/fichiers/cclecture_recommandations_jury.pdf

Franceschini, S., Gori, S., Ruffino, M., Viola, S., Molteni, M. et Facoetti, A. (2013). Action video games make dyslexic children read better. Current Biology, 23(6), 462-466.

LaBerge, D. et Samuels, S. J. (1974). Toward a theory of automatic information processing in reading. Cognitive Psychology, 6(2), 293-323.

Mandin, S., Valdois, S., Bailly, G. et Loiseau, M. (2021a, mai). FLUENCE : projet de conception et d’expérimentation in-situ, longitudinale et à grande échelle d’applications tablettes pour prévenir les difficultés d’apprentissage de la lecture [communication]. Symposium International sur la Littéracie à l’Ecole (SILE), Sherbrooke, Canada.

Mandin, S., Loiseau, M., Bailly, G. et Valdois, S. (2021b). Évaluation de dispositifs numériques innovants pour l’apprentissage de la lecture et de l’anglais : une expérimentation longitudinale en condition écologique. Dans Colloque international SFERE Provence (FED 4238)/Ampiric (p. 60). https://hal.univ-grenoble-alpes.fr/hal-03187570

Mandin, S., Zaher, A., Meyer, S., Loiseau, M., Bailly, G., Payre-Ficout, C., Diard, J., Fluence Group et Valdois, S. (2021c). Expérimentation à grande échelle d’applications pour tablettes pour, favoriser l’apprentissage de la lecture et de l’anglais oral. Dans M. Lefevre et C. Michel (dir.), 10e Conférence sur les Environnements Informatiques pour l’Apprentissage Humain (p. 118-129). https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03292798

Meyer, S., Diard, J. et Valdois, S. (2018). Lecteurs, votre attention s’il vous plaît ! Le rôle de l’attention visuelle en lecture. A.N.A.E., 157, 697-705.

Valdois, S. (2017). Entraîner l’attention visuelle pour remédier aux troubles de la lecture. A.N.A.E., 148, 1-11.

Valdois, S. (2020). L’apprentissage de la lecture. Dans N. Poirel (dir.), Neurosciences Cognitives Développementales (p. 129-159). De Boeck supérieur.

Valdois, S., Reilhac, C., Ginestet, E. et Line Bosse, M. (2021). Varieties of Cognitive Profiles in Poor Readers : Evidence for a VAS-Impaired Subtype. Journal of Learning Disabilities, 54(3), 221-233. https://doi.org/10.1177/0022219420961332

Valdois, S., Roulin, J.-L. et Bosse, M. L. (2019). Visual attention modulates reading acquisition. Vision Research, 165, 152-161.

Wilson, A. J., Revkin, S. K., Cohen, D., Cohen, L. et Dehaene, S. (2006). An open trial assessment of « The Number Race », an adaptive computer game for remediation of dyscalculia. Behavioral and Brain Functions, 2(1), 1-16.

Zoubrinetzky, R., Collet, G., Nguyen-Morel, M.-A., Valdois, S. et Serniclaes, W. (2019). Remediation of allophonic perception and visual attention span in developmental dyslexia: A joint assay. Frontiers in Psychology, 10, 1502. https://doi.org/10.3389/fpsyg.2019.015026

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Thèses

La méthode de la « classe puzzle » améliore-t-elle l’apprentissage ?

Arnaud STANCZAK

Niveaux

Secondaire (collège et lycée)

 

 

 

Public

Enseignant·es du secondaire

 

 

 

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À quelles questions cette étude tente-t-elle de répondre ?

Ce travail de recherche teste l’efficacité du dispositif collaboratif de la « classe puzzle » sur l’apprentissage. La « classe puzzle » repose sur le principe d’interdépendance des ressources où des groupes sont créés en distribuant des ressources complémentaires (par exemple, des activités ou des exemples spécifiques) entre les élèves. À travers trois étapes, les élèves doivent progressivement s’approprier le pédagogique, se préparer à l’expliquer puis le restituer à leurs camarades, au sein des groupes « puzzle ».

En résumé, on cherche à mesurer si des enseignements menés avec l’outil de la « classe puzzle » mènent à de meilleures performances scolaires comparativement à un enseignement réalisé dans des conditions habituelles.

Pour répondre à cette question de recherche, nous avons réalisé cinq études dans différentes classes de sixième, ainsi que deux méta-analyses (revues systématiques de la littérature scientifique qui vise à regrouper et comparer les études s’intéressant à l’efficacité de la « classe puzzle »).

Pourquoi ces questions sont-elles pertinentes ?

La « classe puzzle » est une méthode coopérative relativement populaire (Aronson et Patnoe, 2011). Pourtant, relativement peu de travaux scientifiques valident empiriquement l’efficacité de cette méthode pour les apprentissages : en France, par exemple, très peu d’études ont été menées afin de tester expérimentalement l’efficacité du dispositif des « classes puzzle » sur les apprentissages, comparativement à un groupe contrôle n’impliquant pas l’utilisation de cette méthode. Tester l’efficacité des dispositifs pédagogiques déployés dans les classes est incontournable (Burkhardt et Schoenfeld, 2003). Il est primordial de s’assurer que les outils utilisés pour favoriser le développement social et cognitif des apprenant‧es aient fait l’objet d’une validation scientifique au préalable. Dans ce travail de recherche, nous apportons des éléments théoriques et empiriques qui nous permettent de nuancer les bénéfices associés à la pédagogie de la « classe puzzle » (Roseth et al., 2019).

Quelle méthodologie de recherche a-t-on utilisée ?

Deux approches ont été utilisées pour répondre à notre question de recherche. La première consiste en une méta-analyse qui permet d’obtenir une estimation moyenne de l’efficacité de la méthode (Borenstein et al., 2000). La méta-analyse sert également à quantifier la présence de biais méthodologiques telles que les erreurs de mesures et d’échantillonnage dans les procédures statistiques, ainsi que les biais de publication (c’est-à-dire, un report sélectif de données en faveur d’une hypothèse de recherche). Dans ce travail de recherche, une première méta-analyse a été réalisée sur la littérature scientifique s’intéressant à la « classe puzzle », et une seconde méta-analyse a permis de synthétiser les résultats de nos expérimentations.

La deuxième approche consiste à mener des expérimentations directement dans les classes. L’approche expérimentale permet, « toutes choses égales par ailleurs », de comparer des données obtenues dans une condition expérimentale à une condition dite contrôle, et d’estimer la pertinence de ces différences.

Pour cela, nous avons mené cinq études auprès d’un total de 850 élèves de sixième de l’académie Clermontoise. Sept établissements et 4 enseignant·es (trois en Sciences de la Vie et de la Terre, et un en Physique-Chimie) ont accepté de participer à ces études. À travers ces études, les élèves ont étudié des séquences pédagogiques, soit en condition de « classe puzzle », soit en condition de « contrôle ». Le contenu de ces séquences était identique d’une condition à une autre. Pour les études 1 et 2, qui n’ont duré qu’une séance de 2 heures, la condition « contrôle » consistait en un travail individuel. Les études 3, 4 et 5 se sont étalées le long d’un trimestre (soit environ 15 semaines de cours), et la condition « contrôle » consistait en un enseignement habituel dispensé par les 4 enseignant·es volontaires.

Pour mesurer l’efficacité de la « classe puzzle », nous avons utilisé les scores des élèves à des évaluations de connaissances portant sur les contenus pédagogiques présentés. Pour les deux premières études, contenus et évaluations ont été créés par notre équipe de recherche pour les besoins de l’expérimentation. Pour les études 3, 4 et 5, les évaluations de connaissances ont consisté en des contrôles continus déployés par les enseignant‧es, afin d’évaluer les acquis de chaque élève dans la discipline.

Quels résultats a-t-on obtenus ?

Ce travail de recherche avait pour objectif de tester l’efficacité de la « classe puzzle » — une pédagogie coopérative supposée améliorer l’apprentissage des élèves grâce à une certaine structuration de la coopération — sur l’apprentissage de nouvelles notions. Nous avons soulevé l’idée que, même si cette pédagogie est caractérisée par un engouement important de la part de ses concepteurs, les preuves de son efficacité tendent à manquer.

La première méta-analyse révèle deux problèmes majeurs dans la littérature scientifique : un problème de sous-puissance statistique qui touche plus de 70 % des études analysées ainsi qu’un risque élevé de biais de publication qui impactent négativement la confiance que l’on peut accorder dans les résultats publiés (Funder et Ozer, 2019). En effet, lorsque les études sont réalisées dans de bonnes conditions méthodologiques et avec une puissance de test satisfaisante, c’est-à-dire, un nombre d’élèves suffisamment élevé, les estimations de l’efficacité de la « classe puzzle » suggèrent un effet faible, voire inexistant, alors que les effets positifs s’observent dans des études moins rigoureuses d’un point de vue empirique.

Enfin, les résultats obtenus pour nos cinq études expérimentales n’apportent aucune preuve de l’efficacité de la « classe puzzle » relativement aux groupes contrôles, que l’enseignement soit individuel (études 1 et 2) ou que les pratiques d’enseignement demeurent habituelles (études 3, 4 et 5). La seconde méta-analyse rapporte que l’effet global de la « classe puzzle » sur les performances scolaires est proche de zéro et ne varie pas d’une étude à l’autre.

En conclusion, il est hautement improbable que la « classe puzzle » ait des effets positifs sur les apprentissages des élèves de sixième, tels que mesurés par des évaluations de connaissances utilisées dans nos études.

Que dois-je retenir de cette étude pour ma pratique ?

Les résultats de ces expériences questionnent l’efficacité de la « classe puzzle » sur les apprentissages. De manière générale, les résultats encouragent à adopter une posture critique par rapport aux interventions pédagogiques n’ayant pas fait l’objet de validation empirique solide par la recherche expérimentale (Slavin, 2013).

Les études et méta-analyses développées portent exclusivement sur les apprentissages tels que mesurés par des indicateurs de performances scolaires (c’est-à-dire, évaluations de connaissances) : d’autres variables socio-affectives (par exemple, climat de la classe, motivation) sont susceptibles d’être affectées par la « classe puzzle ».

D’autres études, réalisées sur de plus grands échantillons devront être menées afin de tester les conditions d’émergence d’un effet positif ou négatif de l’utilisation de la méthode de la « classe puzzle ». En effet, l’absence d’effet positif rapporté dans nos études pourrait être dû à des variables modératrices non identifiées. Par exemple, il est possible que l’effet soit positif pour certains élèves, négatif pour d’autres, ce qui pourrait expliquer l’absence d’effet global lorsque ces modérateurs ne sont pas identifiés. Il est donc impératif de mener de nouvelles études avec une puissance de test suffisante (c’est-à-dire, des études réalisées sur des effectifs importants d’élèves) pour tester l’effet de ces variables mais aussi examiner d’autres populations que les élèves de 6e.

Références

Aronson, E. et Patnoe, S. (2011). Cooperation In the Classroom: The Jigsaw Methode (erd. éd.). Pinter & Martin.

Borenstein, M., Hedges, L. V., Higgins, J. P. et Rothstein, H. R. (2021). Introduction to meta-analysis. John Wiley & Sons.

Burkhardt, H. et Schoenfeld, A. H. (2003). Improving educational research: Toward a more useful, more influential, and better-funded enterprise. Educational Researcher, 32(9), 3-14. https://doi.org/10.3102/0013189X032009003

Funder, D. C. et Ozer, D. J. (2019). Evaluating effect size in psychological research: Sense and nonsense. Advances in Methods and Practices in Psychological Science, 2(2), 156-168. https://doi.org/10.1177%2F2515245919847202

Roseth, C. J., Lee, Y.-k. et Saltarelli, W. A. (2019). Reconsidering jigsaw social psychology: Longitudinal effects on social interdependence, sociocognitive conflict regulation, motivation, and achievement. Journal of Educational Psychology, 111(1), 149. https://doi.org/10.1037/edu0000257

Slavin, R. E. (2013). Cooperative learning and student achievement. Dans School and classroom organization (p. 129-158). Routledge. https://doi.org/10.4324/9780203056950-5

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Thèses

L’expérimentation en grande section de Kalulu : un logiciel pour l’apprentissage ludique de la phonétique

Cassandra POTIER-WATKINS

Niveaux

De la Grande Section de maternelle au CP

 

 

 

Public

Enseignants de maternelle et de primaire

 

 

 

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Action/Projet associé(e)

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À quelles questions cette étude tente-t-elle de répondre ?

L’importance de l’enseignement systématique et explicite de la phonétique dans l’enseignement de la lecture est l’un des rares exemples de résultats fructueux issus de collaborations entre les sciences cognitives et la salle de classe. D’une part, l’imagerie cérébrale fonctionnelle a montré comment se met en place le circuit de lecture dans le cerveau ; avec l’apprentissage, les aires consacrées à la reconnaissance visuelle deviennent sensibles aux chaînes de lettres et développent des connexions de plus en plus efficaces avec les régions spécialisées dans le traitement des sons de la parole (Dehaene, 2013 ; Monzalvo et Dehaene-Lambertz, 2013). D’autre part, la recherche observationnelle et interventionnelle a montré que l’enseignement de la phonétique est le meilleur moyen d’apprendre à lire (voir National Reading Panel, 2000, pour les États-Unis ; Rose, 2006, pour la Grande-Bretagne ; Groupe de travail du CSEN, 2019, pour la France). Des recherches antérieures ont testé avec succès des logiciels qui forment à la maîtrise du code alphabétique pour aider les enfants à apprendre à lire (de Graaff et al., 2009 ; Ojanen et al., 2015). Dans notre propre laboratoire, une étude de terrain testant le jeu d’instruction phonétique ELAN a réussi à améliorer la fluidité de la lecture et la compréhension en CP (Watkins et al., 2020). Nos résultats ont soutenu l’hypothèse selon laquelle l’automatisation des compétences de décodage libère des ressources cognitives pour accéder à la compréhension. Cependant, cette étude antérieure souffre de deux limitations : seuls les enfants qui ont été exposés au jeu en début de CP en ont bénéficié, et les résultats étaient affectés, de façon non contrôlée, par l’enseignement formel que les élèves recevaient en classe.

Le projet actuel vise à corriger ces deux limites en examinant, dès la maternelle, si une nouvelle version de notre jeu d’instruction phonétique sur tablette, appelée Kalulu, pourrait : 1) reproduire nos résultats positifs antérieurs en aidant les enfants à s’initier à la lecture ; 2) avoir un effet en grande section de maternelle (GSM), soit l’année avant l’apprentissage formel de la lecture en classe, réduisant ainsi les écarts de niveau observés entre les élèves en début de CP ; et 3) faciliter l’apprentissage de la lecture à leur entrée en CP.

Pourquoi ces questions sont-elles pertinentes ?

De plus en plus d’enseignants se tournent vers les technologies numériques pour soutenir l’apprentissage des élèves, leur fournir une formation ciblée, et les aider à suivre les progrès des élèves. Le marché des applications éducatives est en pleine croissance. Il est donc important que les logiciels fournis aux enseignants reposent sur des principes fondés sur des preuves, et aient fait leurs preuves dans des expérimentations randomisées contrôlées. Il a été démontré que les enfants peuvent apprendre les relations entre les lettres et les sons dès la GSM (Wolf, 2016), et que les interventions précoces dans l’enseignement de la phonétique, surtout lorsqu’elles se font en petits groupes, produisent les effets les plus importants pour les enfants à risque de difficultés en lecture (Cavanaugh et al., 2004). En testant Kalulu avec des enfants de GSM, notre objectif était de mesurer, dans le contexte français, l’impact d’une intervention précoce sur le passage à la lecture et à son apprentissage en CP.

Quelle méthodologie de recherche a-t-on utilisée ?

Les académies de Nice et de Poitiers ont participé au projet. Chaque académie a recruté vingt classes de GSM pour participer à une intervention basée sur l’utilisation de tablettes, ainsi que cinq classes de GSM représentant notre groupe contrôle (classes sans tablettes). Tous les enfants de l’étude ont été testés au début de l’année, après quoi chacune des 40 classes — dites d’intervention — a été assignée au hasard soit à jouer au « Kalulu lettres », soit à jouer au, « Kalulu nombres ». Les versions lettres et nombres sont bien appariées : elles proposent le même environnement de jeu, et visent toutes deux à apprendre les associations entre les symboles (lettres ou chiffres arabes) et leur signification (sons ou quantités). Pendant la deuxième moitié de l’année les classes ont changé de jeu, de sorte que tous les élèves, en fin d’année, aient fait l’expérience des deux méthodes dans des ordres différents. Les groupes sont ainsi appelés « lettres/nombres » et « nombres/lettres » en fonction de l’ordre d’attribution du jeu à jouer.

La randomisation a nécessité un nombre égal de classes dans chaque groupe d’intervention et a été stratifiée en fonction de l’académie d’appartenance (Poitiers ou Nice) et de la taille de la classe. Les classes sans tablettes (groupe contrôle) n’ont pas été randomisées car les enseignants, tout en souhaitant participer, ne voulaient pas recevoir de tablettes. Ce dessin expérimental nous a permis de séparer les effets spécifiques du contenu pédagogique de « Kalulu lettres », de ceux de la simple introduction d’une intervention sous forme de tablettes dans la classe.

Cinq à huit tablettes (en fonction de la taille de la classe) ont été envoyées aux classes d’intervention au début de l’année scolaire. Il a été demandé aux enseignants d’organiser de petits groupes d’élèves, en fonction du nombre de tablettes reçues. Chaque session d’intervention — « Kalulu lettres » et « Kalulu nombres » — a duré dix semaines. Il a été demandé aux enseignants de veiller à ce que les élèves jouent une heure par semaine pendant au moins huit semaines au cours de chaque session d’intervention. Les enseignants pouvaient organiser le temps d’utilisation des tablettes en trois sessions de 20 minutes ou en deux sessions de 30 minutes par semaine.

Pour mesurer l’évolution de l’apprentissage pendant l’intervention, les enfants de tous les groupes — c’est-à-dire, des groupes « lettres/nombres », « nombres/lettres » et « contrôle » — ont été testés en début d’année (pretest), avant de changer de jeu (midtest) et à la fin de l’année (endtest). Nous avons décidé d’utiliser un sous-ensemble de questions de l’évaluation nationale standardisée donnée à tous les enfants en début de CP. En utilisant ce test pour évaluer l’intervention, nous avons pu mesurer les progrès des élèves pendant l’intervention (année de GSM) relativement aux compétences attendues en début de CP. Pour évaluer les effets à plus long terme de l’utilisation du logiciel, nous avons également eu accès aux résultats des enfants aux évaluations nationales de début et de milieu de CP (respectivement 4 mois et 9 mois après l’intervention).

Quels résultats a-t-on obtenus ?

Une première partie de nos résultats concerne l’effet de l’utilisation du logiciel Kalulu sur les compétences en lecture et en mathématiques des élèves de GSM à court terme, c’est-à-dire, immédiatement après utilisation du logiciel (questions de recherche 1 et 2). Relativement au groupe contrôle, l’utilisation du logiciel Kalulu a permis d’améliorer considérablement la connaissance du sens des symboles, tant pour les correspondances graphèmes-phonèmes que pour les correspondances nombres-quantités (voir Figure 1). Cependant, pendant l’intervention en GSM, cette meilleure compréhension des symboles et de leur signification ne s’est guère traduite par des gains plus généraux en lecture ou en mathématiques. En d’autres termes, Kalulu est principalement parvenu à améliorer les connaissances qui étaient explicitement enseignées dans ses mini-jeux, c’est-à-dire, les correspondances graphèmes-phonèmes et les correspondances nombres-quantités (near transfer without far transfer).

Figure présentant les résultats obtenus aux tests portant sur le langage et la lecture et aux tests portant sur les nombres et l'arithmétique pour les trois groupes d'élèves. Description détaillée ci-dessous.
Figure 1 – Résultats de l’étude menée en maternelle. Trois groupes d’élèves de grande section ont été testés : un groupe qui a commencé avec le logiciel Kalulu « lettres » et poursuivi avec la version « nombres », un groupe qui a reçu les logiciels dans l’ordre inverse, et un groupe de contrôle sans tablettes. Dans tous les tests, les trois groupes se sont améliorés au fil du temps (3 points de mesure : pré, mid, post). Cependant, une interaction significative entre le groupe et la période de test (*) indique une amélioration plus importante des performances chez les élèves qui ont bénéficié du jeu correspondant. Les différences significatives sont indiquées pour chaque période (l/n = lettres/nombres, n/l = nombres/lettres, c = contrôle).

Une seconde partie des résultats obtenus concerne l’effet, à moyen et long terme, de l’utilisation du logiciel Kalulu sur les compétences en lecture et en mathématiques des élèves (question de recherche 3). L’année suivante, les tests nationaux en début de CP ont confirmé que les enfants qui avaient joué à Kalulu, comparés aux enfants du groupe contrôle, présentaient un avantage significatif aussi bien dans la connaissance des correspondances graphèmes-phonèmes qu’en conscience phonémique. Tous deux sont des prédicteurs importants de la réussite en lecture (Bradley et Bryant, 1983 ; Melby-Lervågetal., 2012 ; Piquard-Kipffer et Sprenger-Charolles, 2013). Nous avons également constaté une tendance à l’amélioration de la comparaison des nombres pour les enfants qui ont joué à Kalulu. Là encore, la comparaison symbolique de nombres est un prédicteur de la réussite en mathématiques dans les premières années de l’école primaire (Lyons et al., 2014). Cependant, malgré ces résultats encourageants au début de CP, les résultats obtenus lors des évaluations en milieu d’année n’ont pas permis de mettre en évidence un effet positif « à long terme » de l’utilisation de Kalulu en GSM. Nous ignorons ce qui a pu se passer entre le début et le milieu du CP, mais il est possible que les enseignants, ayant observé des résultats inférieurs pour les élèves du groupe contrôle, leur aient apporté un surcroît d’enseignement venu compenser et, éventuellement, annihiler la différence initiale.

Que dois-je retenir de cette étude pour ma pratique ?

  • Le jeu Kalulu aide les enfants à consolider les liens entre les symboles et leur signification, qu’il s’agisse de lettres ou de nombres. Ce résultat positif suggère que Kalulu peut permettre un enseignement non seulement ludique mais aussi pertinent de la phonétique aux enfants et ce, dès la GSM. Le jeu Kalulu constitue donc un support favorable au développement des compétences précoces en lecture et en mathématiques, support complémentaire aux pratiques pédagogiques de l’enseignant.
  • Cette impulsion précoce dans l’apprentissage de la phonétique a continué à fournir un avantage dans la compréhension des correspondances graphèmes-phonèmes après l’été, 4 mois après l’intervention. Ce résultat n’est pas négligeable dans la mesure où une légère baisse dans tous les domaines académiques est généralement observée pendant l’été (Cooper et al., 1996). Cependant, contrairement à l’utilisation d’un logiciel similaire (ELAN) en début de CP, l’utilisation de Kalulu en GSM (pendant seulement 8 semaines) n’a pas permis de produire un avantage significatif en lecture à la mi-CP. Notre hypothèse est que les gains en fluence et en compréhension observés dans notre étude précédente ont probablement bénéficié de l’impact combiné de l’utilisation du jeu avec des pratiques éducatives plus formelles fournies par l’enseignant, comme la lecture à voix haute. Kalulu soutient l’acquisition de la phonétique, mais l’apprentissage de la lecture dépend de la synergie avec le programme de l’enseignant, y compris la lecture à voix haute.
  • Les enfants ont appris, joué et apprécié le jeu Kalulu. Nos résultats soulignent la nécessité de fournir aux enseignants des logiciels de qualité basés sur les recherches en sciences cognitives.
  • À l’avenir, il conviendrait sans doute de combiner l’usage du logiciel Kalulu sur une durée plus longue, en maternelle et en début de CP, avec un accompagnement pédagogique par l’enseignant, en s’appuyant sur le manuel pédagogique fourni avec le logiciel.

Références

Bradley, L. et Bryant, P. E. (1983). Categorizing sounds and learning to read–a causal connection. Nature, 301(5899), 419-421. https://doi.org/10.1038/301419a0

Cavanaugh, C. L., Kim, A.-H., Wanzek, J. et Vaughn, S. (2004). Kindergarten Reading Interventions for At-Risk Students: Twenty Years of Research. Learning Disabilities: A Contemporary Journal, 2(1), 9-21.

Cooper, H., Nye, B., Charlton, K., Lindsay, J. et Greathouse, S. (1996). The effects of summer vacation on achievement test scores: A narrative and meta-analytic review. Review of Educational Research, 66(3), 227-268. https://doi.org/10.3102/00346543066003227

de Graaff, S., Bosman, A. M., Hasselman, F. et Verhoeven, L. (2009). Benefits of systematic phonics ins-truction. Scientific Studies of Reading, 13(4), 318-333. https://doi.org/10.1080/10888430903001308

Dehaene, S. (2013). Inside the letterbox: how literacy transforms the human brain (vol. 2013). Dana Foundation. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3704307/

Groupe de travail du CSEN. (2019). ÉvalAide, un dispositif scientifique de prévention des difficultés en lecture et en mathématiques en CP et en CE1. Canopé. https://www.reseau-canope.fr/fileadmin/user_upload/Projets/conference_role_experimentation_domaine_educatif/EvalAide_CSEN_Definitif_Mai2019.pdf

Lyons, I. M., Price, G. R., Vaessen, A., Blomert, L. et Ansari, D. (2014). Numerical predictors of arithmetic success in grades 1–6. Developmental Science, 17(5), 714-726. https://doi.org/10.1111/desc.12152

Melby-Lervåg, M., Lyster, S.-A. H. et Hulme, C. (2012). Phonological skills and their role in learning toread: a meta-analytic review. Psychological Bulletin, 138(2), 322. https://doi.org/10.1037/a0026744

Monzalvo, K. et Dehaene-Lambertz, G. (2013). How reading acquisition changes children’s spoken language network. Brain and Language, 127(3), 356-365. https://doi.org/10.1016/j.bandl.2013.10.009

National Reading Panel. (2000). Teaching children to read: An evidence-based assessment of the scientific research literature on reading and its implications for reading instruction: Reports of the subgroups (NIH Publication No. 00-4769). National Institute of Child Health & Human Development (US). https://www.nichd.nih.gov/sites/default/files/publications/pubs/nrp/Documents/report.pdf

Ojanen, E., Ronimus, M., Ahonen, T., Chansa-Kabali, T., February, P., Jere-Folotiya, J., Kauppinen, K.-P.,Ketonen, R., Ngorosho, D., Pitkänen, M. et al., (2015). GraphoGame–a catalyst for multi-level promotion of literacy in diverse contexts. Frontiers in Psychology, 6, 671. https://doi.org/10.3389/fpsyg.2015.00671

Piquard-Kipffer, A. et Sprenger-Charolles, L. (2013). Early predictors of future reading skills: A follow-up of French-speaking children from the beginning of kindergarten to the end of the second grade (age 5 to 8). L’Année psychologique, 113(4), 491-521. https://www.researchgate.net/profile/Liliane_Sprenger- Charolles/publication/278736652_Prdiction_ds_la_maternelle_des_habilets_de_lecture_de_fin_de_CE1._Suivi_de_85_enfants_de_langue_maternelle_franaise_de_4__8_ans/links/558bc80c08aee99ca9ca5b8b.pdf

Potier Watkins, C. , Caporal, J., Merville, C., Kouider, S. et Dehaene, S. (2020). Accelerating reading acquisition and boosting comprehension with a cognitive science-based tablet training. Journal of Computers in Education, 7(2), 183-212. https://doi.org/10.1007/s40692-019-00152-6

Rose, J. (2006). Independent review of the teaching of early reading. DfES. http://dera.ioe.ac.uk/5551/3/5d970d28fc535dc54eb4dee9995bef36.pdf

Wolf, G. M. (2016). Letter-Sound Reading: Teaching preschool children print-to-sound processing. Early Childhood Education Journal, 44(1), 11-19. https://doi.org/10.1007/s10643-014-0685-y

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Thèses

Controverses en classes de collège : l’impact de l’attitude préalable des élèves sur le traitement de vidéos présentant des informations contradictoires

Colin LESCARRET

Niveaux

Collège

 

 

 

Public

Enseignants des cycles 3 et 4 (et tous les enseignants qui abordent des questions d’actualités en classe)

 

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À quelles questions cette étude tente-t-elle de répondre ?

Plusieurs auteurs font le postulat qu’étudier des sujets d’actualité ou controversés en classe est un moyen d’entraîner l’esprit critique des élèves, en les introduisant à l’argumentation (voir par exemple, Simonneaux, 2008). Les sujets controversés faisant régulièrement objets de débats dans la société, les élèves sont toutefois susceptibles d’aborder les tâches proposées par l’enseignant avec une opinion déjà plus ou moins tranchée sur le sujet (Bohn-Gettler et McCrudden, 2018). Malgré tous les efforts déployés par l’enseignant pour aborder le sujet de façon objective, les élèves sont ainsi susceptibles de protéger leurs représentations du monde pré-existantes et traiter partiellement les informations présentées par l’enseignant — comme de nombreuses études ont pu le démontrer en contexte de traitement d’informations contradictoires (Richter et Maier, 2017).

Cette étude a cherché à mieux comprendre l’impact de l’opinion préalable des élèves sur le traitement d’informations contradictoires, avec deux spécificités : (1) la centration sur des apprenants jeunes(collégiens) comme population d’étude et (2) le choix de la vidéo comme média de présentation des informations contradictoires. Deux axes de recherches ont ainsi été développés dans cette étude :

  1. Le premier axe de recherche s’est intéressé à l’impact de l’opinion préalable des élèves sur le traitement de vidéos présentant des informations contradictoires sur une controverse socio-scientifique (« Faut-il manger bio pour améliorer sa santé et mieux préserver l’environnement ? »). Dans le cadre de cet axe de recherche, l’hypothèse d’un traitement biaisé des informations présentées dans les vidéos (plus grande attention portée par les élèves aux informations compatibles avec leur opinion préalable sur le sujet par exemple) a notamment été explorée.
  2. Le deuxième axe de recherche s’est focalisé sur le traitement par les élèves de la source lors du visionnage de vidéos présentant des informations contradictoires. Les travaux menés dans le cadre de cet axe de recherche ont notamment questionné si les élèves prêtaient attention aux informations données sur la source (identité de la personne s’exprimant à l’écran) au cours du visionnage de vidéos et si oui, dans quelle mesure l’expertise de la source sur le sujet avait un impact sur l’adhésion des élèves à son discours.

Pourquoi ces questions sont-elles pertinentes ?

Le choix de collégiens comme population d’étude a été motivé par le manque de travaux menés sur le traitement d’informations contradictoires auprès de jeunes apprenants. Ce type de travaux ont, en effet, très majoritairement été réalisés auprès d’étudiants avancés (lycéens, étudiants d’Université) et il est possible de questionner dans quelle mesure les résultats déjà obtenus se répliquent auprès d’une population plus jeune et aux caractéristiques (connaissances préalables sur le sujet, croyances sur ce qui constitue une « preuve ») potentiellement différentes. Le choix de la vidéo comme média de présentation des informations contradictoires a, de même, été motivé par un manque d’études employant ce support d’apprentissage. En effet, la quasi-totalité des études sur le traitement d’informations contradictoires ont employé des textes (imprimés ou en ligne) pour tester leurs hypothèses. Pourtant, la vidéo fait aujourd’hui partie du quotidien des élèves, que ce soit dans un cadre scolaire ou de loisirs.

En 2018, 95 % des 7-19 ans français déclaraient utiliser internet pour regarder des vidéos et plus de la moitié des sondés indiquaient qu’il s’agissait de leur usage d’internet le plus fréquent (IPSOS, 2018). Or, les plateformes de partage comme YouTube autorisent quiconque à poster des vidéos sur n’importe quel sujet et la fiabilité des informations que les élèves peuvent y trouver peut grandement varier. Après avoir analysé le contenu des 200 premières vidéos proposées par YouTube lorsque les mots-clés « climate » ou « climate change » étaient recherchés, Allgaier (2019) a pu faire le constat que plus de la moitié des vidéos proposées partageaient des thèses climatosceptiques, voire conspirationnistes sur le changement climatique. Il existe ainsi un enjeu pédagogique fort à entraîner les élèves à traiter de façon critique les vidéos auxquelles ils sont confrontés, que ce soit dans un cadre scolaire ou dans leur vie quotidienne.

Quelle méthodologie de recherche a-t-on utilisée ?

L’échantillon d’élèves mobilisés dans le cadre de cette étude était composé d’environ 600 élèves de 5e (moyenne d’âge de 12 ans), issus de six collèges de la Région Occitanie. La moitié des collèges dans lesquels étudiaient les élèves étaient situés en zone rurale, l’autre moitié en zone urbaine (Capitale de Région, Préfecture).

Axe 1 : Dans le cadre de cet axe de recherche, les élèves étaient exposés à une série d’extraits de reportages TV et de documentaires présentant des arguments scientifiques contradictoires sur la question « Manger bio est-il meilleur pour la santé et l’environnement ? ». La moitié des vidéos présentaient des arguments confirmant un impact positif du bio sur la santé et l’environnement, et l’autre moitié, des arguments réfutant ces bénéfices.
L’opinion des élèves sur le thème (pour ou contre consommer des aliments biologiques ?) était évaluée, à l’aide d’échelles standardisées1 et d’une tâche de rédaction argumentative, en trois temps : (1) avant le visionnage des vidéos, (2) directement après le visionnage et (3) une semaine plus tard, nous permettant ainsi de mettre en évidence une potentielle évolution.
Le temps de lecture de chaque vidéo était enregistré (les élèves étaient laissés libres de visionner les vidéos à leur rythme), et la mémorisation des arguments des vidéos par les élèves était évaluée par QCM (directement après le visionnage des vidéos, et une semaine plus tard). Les élèves devaient par ailleurs évaluer chaque argument présenté dans les vidéos à l’aide d’une échelle bipolaire (« À quel point as-tu jugé convaincant cet argument ? » — « Pas du tout convaincant » à « Tout à fait convaincant »).

Axe 2 : Dans le cadre de cet axe de recherche, les élèves étaient exposés à des extraits d’interviews vidéo réalisés par l’agence SapiensSapiens pour les besoins de l’étude, dans lesquels deux individus prenaient position de façon opposée sur la question « L’agriculture biologique pourra-t-elle nourrir toute la planète en 2050 ? ». Le premier individu se positionnait comme favorable à ce changement et argumentait que ce changement de paradigme agricole aurait des conséquences positives, l’autre se positionnait comme défavorable et donnait des arguments pour défendre que ce changement aurait des conséquences néfastes.
L’expertise des individus interviewés était manipulée en présentant chacun soit comme (1) un chercheur en agronomie, (2) un agriculteur produisant de façon biologique, (3) un consommateur interrogé durant ses courses, à l’aide d’un bandeau présentant l’identité de l’interviewé au début de chaque vidéo.
À l’issue du visionnage (et une semaine après le visionnage), les élèves avaient à réaliser une tâche de reconnaissance évaluant leur mémorisation de l’identité des interviewés et de ses principaux arguments. Les élèves devaient par ailleurs évaluer l’expertise des interviewés sur le sujet et la confiance qu’ils accordaient à ses propos à l’aide d’échelles standardisées. Enfin, les élèves devaient indiquer quel interviewé ils jugeaient le plus convaincant et justifier leur réponse à l’écrit.

Quels résultats a-t-on obtenus ?

Axe 1 : Les résultats en termes de temps de lecture et de performances de mémorisation ne montrent aucun effet de l’opinion préalable des élèves aussi bien sur le comportement de visionnage des élèves, que sur la nature des arguments les mieux mémorisés par les élèves. Contrairement à nos hypothèses et aux résultats rapportés dans la littérature sur des élèves plus âgés (lycéens, étudiants), les élèves participant à cette étude n’ont pas regardé plus longtemps ni mieux mémorisé les vidéos qui présentaient des arguments compatibles avec leur opinion préalable sur le sujet.
Les élèves ont eu tendance à juger les arguments compatibles avec leur opinion préalable comme plus convaincants que les arguments remettant leur opinion en question, mais cet effet s’avère de taille faible et ne concerne qu’une part limitée d’élèves.
Le résultat le plus marquant (et surprenant au regard de la littérature) est que les élèves rapportent une modération de leur opinion sur le sujet suite au visionnage des vidéos, s’observant à la fois sur les échelles standardisées et leurs écrits argumentatifs. Autrement dit, les élèves initialement favorables à la consommation de produits biologiques rapportent une opinion plus défavorable suite au visionnage, le pattern inverse étant observé pour les élèves initialement défavorables.
D’importantes difficultés pour « faire sens » aux arguments présentés dans les vidéos sont toutefois relevées dans les écrits argumentatifs des élèves, ceux-ci justifiant peu leur réponse et rédigeant parfois des paragraphes incohérents (arguments cités incompatibles avec la position qu’ils défendent).

Axe 2 : Les résultats aux tests de reconnaissance montrent que les élèves ont bien fait attention à l’identité de la personne s’exprimant à l’écran au cours du visionnage des vidéos (plus de 70 % des élèves obtiennent un score égal ou supérieur à 3/4 au test une semaine après avoir vu les vidéos). Les évaluations réalisées par les élèves portant sur la crédibilité des interviewés sont, par ailleurs, cohérentes avec l’identité assignée à l’individu — les sources expertes (chercheur, agriculteur) étant jugées plus crédibles que la source non-experte (consommateur).
Toutefois, un biais est relevé dans l’évaluation des sources par les élèves ; la source donnant des arguments compatibles avec leur opinion préalable étant jugée plus crédible que la source donnant des arguments incompatibles (indépendamment de l’expertise de la source sur le sujet).
Par ailleurs, seule une minorité d’élèves (environ 30 %) jugent, à l’issue du visionnage, les interviewés présentés comme experts comme les plus convaincants sur le sujet. La majorité des élèves indiquent trouver les deux interviewés aussi convaincants l’un que l’autre (même dans la situation où les élèves voyaient un chercheur et un consommateur), voire la source la moins experte comme la plus convaincante.
Enfin, la source donnant des arguments compatibles avec l’opinion préalable des élèves sur le sujet est là encore, plus souvent jugée par les élèves comme la plus convaincante, comparée à la source donnant des arguments incompatibles, et ce, quelle que soit l’expertise de la source sur le sujet.

Que dois-je retenir de cette étude pour ma pratique ?

  • Le visionnage de vidéos présentant des arguments contradictoires (interviews d’individus exprimant des positions divergentes sur le sujet, par exemple) apparaît comme une pratique pédagogique utile pour aborder des sujets d’actualité ou controversés avec des collégiens. Les résultats de notre étude suggèrent en effet que les élèves sont enclins à questionner leur opinion, leurs croyances, après avoir été exposés à des arguments contradictoires sur le sujet sous forme de vidéos.
  • Deux points de vigilance sont toutefois à retenir :
    • Quand beaucoup d’arguments contradictoires sont donnés dans les vidéos, les élèves du niveau interrogés dans notre étude (5e) peuvent rencontrer d’importantes difficultés à restituer ces arguments de façon cohérente à l’écrit. Fournir un guide de rédaction (demandant de lister un certain nombre d’arguments présentés dans les vidéos et donnant des pistes sur la façon de les organiser, par exemple) apparaît nécessaire pour que les élèves rendent réellement compte du caractère controversé du débat dans leurs écrits et tirent profit de l’exercice.
    • Si les élèves accordent bien de l’attention à l’identité de la personne s’exprimant à l’écran lorsqu’ils visionnent des vidéos, ce n’est pas pour autant qu’une personne identifiable comme experte sur le sujet sera jugée par les élèves comme plus convaincante. De façon générale, les résultats de notre étude montrent que les élèves accordent plus d’importance aux arguments de la source (et si ses arguments sont compatibles avec leur opinion sur le sujet) qu’à l’expertise de la source sur le sujet. Dans l’optique d’un traitement « critique » de vidéos, il semble ainsi nécessaire de mettre l’accent sur l’importance de l’expertise de la source, afin que cette donnée soit mobilisée par les élèves comme critère pour évaluer la fiabilité du discours de la source (Potocki et al., 2020).

Note de bas de page :

  1. Les échelles utilisées (attitude des élèves à l’égard de la consommation de produits biologiques et force de l’attitude) ont fait l’objet d’une validation psychométrique dans le cadre de l’étude et sont accessibles sur simple demande à l’auteur. ↩︎

Références

Allgaier, J. (2019). Science and environmental communication on YouTube: strategically distorted communications in online videos on climate change and climate engineering. Frontiers in Communication, 4, 36. https://doi.org/10.3389/fcomm.2019.00036

Bohn-Gettler, C. M. et McCrudden, M. T. (2018). Effects of task relevance instructions and topic beliefs on reading processes and memory. Discourse Processes, 55(4), 410-431. https://doi.org/10.1080/0163853X.2017.1292824

Potocki, A., de Pereyra, G., Ros, C., Macedo-Rouet, M., Stadtler, M., Salmerón, L. et Rouet, J.-F. (2020). The development of source evaluation skills during adolescence: exploring different levels of source processing and their relationships (El desarrollo de las habilidades de evaluación de lasfuentes durante la adolescencia : una exploración de los distintos niveles de procesamiento delas fuentes y sus relaciones). Journal for the Study of Education and Development, 43(1), 19-59. https://doi.org/10.1080/02103702.2019.1690848

Richter, T. et Maier, J. (2017). Comprehension of multiple documents with conflicting information: A two-step model of validation. Educational Psychologist, 52(3), 148-166. https://doi.org/10.1080/00461520.2017.1322968

Simonneaux, L. (2008). L’enseignement des questions socialement vives et l’éducation au développement durable. Pour, 198(3), 179-185. https://doi.org/10.3917/pour.198.01795

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Thèses

Quand l’outil didactique et numérique ne suffit pas à mieux apprendre l’orthographe

Prisca FENOGLIO

Niveaux

CM1, CM2, 6e

 

 

 

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Enseignant·e·s d’élémentaire, professeur·e·s de français en collège

 

 

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À quelles questions cette étude tente-t-elle de répondre ?

Notre étude, ancrée dans le projet de recherche Twictée pour apprendre l’orthographe (TAO), examine un outil didactique et numérique au sein du dispositif Twictée1, créé par des enseignants et utilisé au primaire et au collège. Dans ce dispositif, les classes échangent, dans un premier temps, des phrases dictées, les « twictées », par messagerie privée. Dans un second temps, des corrections argumentées des erreurs des dictées reçues sont envoyées, par Twitter, à la classe partenaire. Ces corrections, les « twoutils », sont élaborées en petits groupes par les élèves. Les twoutils sont construits sur un modèle imposé pour rédiger la correction, la justification de la correction, et la catégorisation de chaque erreur repérée en amont avec l’enseignant, dans les dictées reçues. Voici un exemple de twoutil, produit par des élèves, puis envoyé sur Twitter :

Exemple de twoutil produit par des élèves puis envoyé sur Twitter. Description détaillée ci-dessous.

Outre l’adresse (@CmVernoux) et le mot-clé (#twoutil), trois parties distinctes composent le twoutil : la correction (« “Chaque” s’écrit sans “s” »), la justification2 de la correction de l’erreur (« car c’est une forme invariable »), et sa catégorisation par une balise (« #motsinvariables »). Le hashtag (ou balise)a été intégré aux twoutils suivant une typologie préétablie par les concepteurs du dispositif, appelée le « #DicoBalises ». Ce dernier comporte vingt-quatre balises classées en trois parties : l’orthographe grammaticale (exemple : #AccordGN pour accord dans le groupe nominal), lexicale (exemple : #Let-treManquante) et la logographie (sont rangées sous cette dénomination des erreurs variées, comme #Segmentation ou #Majuscule).

Dans ce travail de recherche, nous examinons si l’outil « twoutil » répond aux objectifs visés par leurs concepteurs : favoriser la réflexion (par la justification et la catégorisation des erreurs orthographiques) et la motivation de tou·te·s les élèves. Les questions posées sont les suivantes : (1) Quelles sont les appropriations de l’outil par les élèves et leurs enseignant·e·s ? (2) Y a-t-il des décalages observables dans ces appropriations entre élèves et enseignants, et si oui de quelle nature sont-ils ? (3) Est-ce que les élèves les plus faibles en orthographe sont plus touché·e·s par ces décalages ? Nous analysons donc les appropriations des twoutils chez des élèves et leurs enseignant·e·s, avec une attention particulière portée aux élèves les moins performant·e·s en orthographe, puis nous les mettons en dialogue.

Pourquoi ces questions sont-elles pertinentes ?

Question 1 : quelles appropriations de l’outil. Les travaux portant sur les outils, que ce soit dans le champ de la didactique ou à propos des usages numériques, posent la question de leurs appropriations, question centrale vis-à-vis des objectifs d’apprentissage visés. Relativement aux outils didactiques, la variété, la complexité et l’importance des schèmes d’utilisation (la manière dont les outils sont utilisés)ont été soulignées (Cèbe et Goigoux, 2007). Relativement aux outils numériques, les travaux insistent sur la notion d’usage (Proulx, 2005), que l’on peut rapprocher des schèmes d’utilisation. Pour certain·e·s chercheur·euse·s, les appropriations sont constituées non seulement par l’activité, mais aussi par les perceptions et représentations (Reuter et al., 2013). Dans la lignée de ces travaux, faire état de la variété des appropriations (activité et perceptions) de l’outil « twoutil », par les élèves et leurs enseignant·e·s, constitue une première étape descriptive de notre travail.

Question 2 : quels décalages dans les appropriations de l’outil. Des décalages possibles entre intentions et appropriations ont été soulignés à propos des outils didactiques (Schneuwly, 2000). Or, par un espace commun de conceptions, on peut « supposer des effets positifs, à la fois sur le plan des buts scolaires à poursuivre par les élèves et sur leur façon de se préparer […] » (Issaieva et al., 2011, § 39). Si les objectifs de l’outil « twoutil » sont correctement perçus par les élèves, l’outil comporte moins le risque d’aller « à l’encontre des objectifs affirmés en dressant des obstacles supplémentaires au travail cognitif requis par l’appropriation des savoirs par les élèves » (Bautier et Rochex, 1997/2007, p. 238). En d’autres termes, il y aurait de meilleures chances de construire une compréhension commune favorable aux apprentissages. Aussi, mettre en dialogue les perceptions des élèves et celles de leurs enseignant·e·s, puis leur activité avec l’outil, permet d’examiner les décalages dans les appropriations de l’outil « twoutil », répondant ainsi à l’objectif évaluatif de notre étude.

Question 3 : quelles appropriations par les élèves les plus faibles en orthographe. Chez les élèves en difficulté, les malentendus quant à la nature et aux objectifs de l’activité avec l’outil « twoutil » sont plus à même d’advenir (Bautier et Rochex, 1997/2007). Or, l’enjeu cognitif des tâches joue un rôle essentiel dans le succès ou l’échec des apprentissages. À cela s’ajoute le fait qu’en France, l’orthographe constitue un enjeu culturel et social (Brissaud, 2011). Par conséquent, accompagner les élèves les plus faibles et comprendre leurs difficultés demeure une question de recherche majeure et d’actualité pour le·la chercheur·se en didactique de l’orthographe. Pour ces raisons, nous portons une attention particulièreaux résultats obtenus par et au sujet des élèves les moins performant·e·s en orthographe. Pour conclure, les recherches sur les outils didactiques et numériques, notamment dans le domaine de la didactique de l’orthographe et de l’écrit, montrent que ces outils ne peuvent être examinés en dehors de leurs appropriations. En effet, par les décalages et malentendus possibles, ils peuvent constituer un obstacle aux apprentissages, particulièrement pour les élèves en difficulté, qui sont déjà la cible de la « stigmatisation orthographique ». Étudier les appropriations des twoutils, avec une attention particulière aux élèves en difficulté, est donc indispensable afin de décrire et évaluer leur portée réflexive et motivationnelle. Cela permettra d’approfondir les connaissances actuelles sur les intérêts et les limites des outils pour les apprentissages de tou·te·s les élèves.

Quelle méthodologie de recherche a-t-on utilisée ?

Nous avons conduit une étude de cas multiples dans cinq classes « twictantes » de cycle 3 de l’académie de Grenoble (une classe de CE2/CM13, deux classes de CM1/CM2, deux classes de 6e). Nous avons recueilli deux séries d’entretiens auprès de 45 élèves de ces cinq classes (début et fin d’année 2017-2018), dont le niveau orthographique a été estimé par leurs enseignant·e·s, selon la connaissance qu’ils avaient de leurs élèves (15 « faibles », 17 « moyens » et 13 « forts »). Ces entretiens comportent une partie métagraphique, dans laquelle la chercheuse demande à l’élève d’expliquer ses choix graphiques (justes ou erronés) dans une dictée faite en début d’année. Les autres parties des entretiens concernent les perceptions du dispositif et de l’outil « twoutil ». En parallèle, nous avons aussi conduit trois séries d’entretiens auprès des cinq enseignant·e·s (2017, 2018, 2019), visant à interroger leurs perceptions de l’enseignement de l’orthographe et du dispositif. Nous avons collecté en fin d’année des questionnaires pour 113 élèves (construction d’un twoutil individuel et perceptions du dispositif et de l’outil) et, en début d’année, pour les enseignant·e·s (informations personnelles, parcours, classe, enseignement de l’orthographe). Enfin, nous avons filmé 8 h 20 d’interactions lors de l’élaboration de twoutils en petits groupes en fin d’année (67 élèves, dont 35 ont aussi participé aux entretiens).

Pour décrire les appropriations des twoutils (question 1), nous avons procédé en deux étapes. Tout d’abord, pour examiner les perceptions de l’outil, nous avons effectué des analyses de contenu thématique et des statistiques descriptives à partir des entretiens et des questionnaires. Ensuite, pour analyser l’activité avec l’outil, nous avons fait des analyses de contenus et des statistiques (descriptives et inférentielles) à partir des échanges langagiers et des twoutils individuels produits par les élèves dans leurs questionnaires. La mise en dialogue des appropriations (question 2) a été faite en confrontant les résultats obtenus pour les élèves et les enseignant·e·s quant à leurs perceptions, puis quant à leur activité. Pour les questions 1 et 2, nous avons différencié les niveaux scolaires et les niveaux de performance orthographique des élèves, et une attention particulière a été portée aux 15 élèves les moins performant·e·s. Nous avons également dressé des portraits de chacun·e de ces élèves en difficulté, à partir de toutes les données que nous avions recueillies à leur sujet (question 3). L’objectif est d’observer de quelle manière ces portraits s’inscrivent dans les résultats sur les perceptions et l’activité de tou·te·s les élèves, et de les enrichir par le biais de l’analyse de l’évolution de leurs conceptions orthographiques entre le début et la fin de l’année (entretiens métagraphiques).

Quels résultats a-t-on obtenus ?

Les premiers résultats décrivent les appropriations de l’outil (première question de recherche). En ce qui concerne les perceptions, les enseignant·e·s estiment l’outil motivant et utile aux apprentissages. Ils en relèvent, parfois, certaines difficultés, notamment celle de catégoriser les erreurs selon la typologie d’erreurs proposée (#DicoBalises). Ils ne pensent pas le numérique en lien avec ses possibilités didactiques (l’écrit), mais plutôt pédagogiques (la motivation, les échanges entre pairs). Il y a, en ce sens, un malentendu « didactique » sur les possibilités de l’outil. Les élèves pensent que l’outil est motivant et utile aux apprentissages, grâce au travail de groupe. La difficulté de l’outil est très présente, particulièrement celle des catégories d’erreurs, et accrue pour les plus faibles. En ce qui concerne l’activité, les mises en œuvre de l’outil par les enseignant·e·s sont variées, certaines plus personnalisées que d’autres. L’étayage est axé sur l’identification, par exemple de la nature ou du genre du mot (« quoi »). Il se caractérise par le manque de questions axées sur les procédures (« comment ») ou le fonctionnement de la langue (« pourquoi »). Du côté des élèves, les conduites langagières sont plus affirmatives et répétitives que réflexives (Fenoglio et Brissaud, 2020). Lorsqu’elles·ils travaillent de manière collaborative, les élèves parviennent à accomplir la tâche demandée avec un niveau de précision plus élevé qu’individuellement. Enfin, le choix de la catégorie d’erreur pose problème de manière chronique, en particulier pour les plus faibles. Cependant, plus leur explication de l’erreur est précise, plus les élèves parviennent à la catégoriser (Fenoglio, 2019).

Relativement à notre deuxième question de recherche, un décalage s’est confirmé quant à la difficulté de cet outil, perçue par les élèves mais peu soulignée par les enseignant·e·s, et quant à l’intérêt motivationnel du numérique, survalorisé par les enseignant·e·s. Cependant, les perceptions de la collaboration et de l’utilité de l’outil pour les apprentissages convergent. Si un espace commun de perceptions semble bien exister entre enseignant·e·s et élèves, les décalages observés pourraient obstruer la compréhension commune des buts de cet outil, et faire obstacle aux apprentissages (Fenoglio et al., 2021). Un hiatus entre les objectifs pédagogiques annoncés pour l’outil et l’activité des élèves a été soulevé (Fenoglio et Brissaud, 2020) et éclairé par le biais de l’analyse de l’activité des enseignant·e·s. En privilégiant des questions en « quoi », voire en donnant la solution, les enseignant·e·s omettent l’étayage sur les procédures et le fonctionnement de la langue, ce qui conduit les élèves à peu s’interroger sur les stratégies (« comment ») ou sur la langue en tant que système (« pourquoi »). Toutefois, plus les enseignant·e·s s’approprient l’outil en personnalisant sa mise en œuvre, plus les conduites langagières observées chez leurs élèves sont réflexives, y compris chez les moins performant·e·s.

En ce qui concerne les 15 élèves les plus faibles en orthographe (question 3), leur appréciation de l’outil fait écho aux résultats concernant tou·te·s les élèves, en cristallisant les difficultés perçues des twoutils. Les difficultés relevées sur l’activité de tou·te·s les élèves s’accentuent également pour ces élèves. L’analyse des entretiens métagraphiques montre qu’ils n’utilisent quasiment aucun argument morphosyntaxique (c’est-à-dire tissant des liens syntaxiques, ex. « ce verbe s’accorde avec son sujet »), signe de développement de compétences métalinguistiques (Cogis, 2005). Si la progression sur les accords du groupe nominal est perceptible pour tous les élèves en difficulté, ceux-ci progressent de manière différenciée sur les formes verbales et la catégorisation. Ces résultats esquissent une perspective sur la progression orthographique des élèves moins performant·e·s lors de cette année scolaire passée à utiliser le dispositif Twictée et son outil twoutil.

Que dois-je retenir de cette étude pour ma pratique ?

  • Les outils ne sont pas autotransformateurs et peuvent, au contraire, faire obstacle aux apprentis-sages, particulièrement pour les élèves moins performant·e·s. Dans notre étude, plus les ensei-gnant·e·s s’approprient les twoutils par une mise en œuvre personnalisée, plus cela encourage des conduites réflexives chez leurs élèves, y compris chez les moins performant·e·s.
  • Du point de vue didactique, lorsque les élèves travaillent sur la langue, l’enseignant·e doit étayer l’activité en favorisant des questions orientées vers les procédures (« comment ») et le fonctionnement de la langue (« pourquoi »), afin de les aider à développer une justification précise, et de mieux réfléchir à la catégorisation des erreurs (Fenoglio, 2020). De plus, un nombre restreint de catégories d’erreurs gagnerait à être construit de manière inductive et progressive avec les élèves, afin de donner à la catégorisation son plein potentiel cognitif, mais aussi didactique.
  • La présence du numérique n’augmente pas la motivation des élèves, contrairement aux représentations de leurs enseignant·e·s. Les élèves se déclarent surtout motivé·e·s par la dimension collaborative de l’outil. Pour impliquer tou·te·s les élèves, cette dimension pourrait bénéficier d’un scénario de tutorat entre pairs.
  • Il s’agit de tirer profit des affordances de l’outil technologique pour les apprentissages.
    • La dimension rédigée des twoutils est essentielle à la réflexion des élèves (Goody, 1979). Les faire rédiger individuellement permettrait de faire en sorte que tous, même les moins rapides, s’approprient ce travail.
    • Les fonctionnalités d’indexation du hashtag sur Twitter pourraient être utiles pour élaborer, par l’observation et la manipulation d’un corpus de twoutils, le sens des catégories en lien avec les justifications proposées. Ceci permettrait d’adapter la pensée computationnelle aux besoins de la réflexion — et non l’inverse. La démarche serait explicite, et favorable aux apprentissages de tou·te·s.
    • Le transfert en production écrite, préconisé par les didacticien·ne·s de l’orthographe (voir par exemple Cogis, 2005), pourrait être soutenu par le biais des envois sur Twitter. Ainsi, écrire un court texte sur le thème et les items de difficulté de la twictée permettrait aux élèves de transférer leurs connaissances et de s’engager dans une situation d’écriture.

Notes de bas de page :

  1. www.twictee.org ↩︎
  2. Ce terme est utilisé par les concepteurs du dispositif. Il s’agit toutefois d’une explication : l’élève doit expliquer ses choix graphiques, et non les démontrer dans le but de convaincre. ↩︎
  3. Les dix élèves de CE2, qui ne font pas partie du cycle 3, ont été exclu·e·s de nos analyses, mis à part les cinq élèves de CE2 qui ont participé aux échanges langagiers filmés. ↩︎

Références

Bautier, É. et Rochex, J.-Y. (1997/2007). Apprendre : des malentendus qui font la différence. Dans J. Deauvieau et J.-P. Terrail (dir.), Les sociologues, l’école et la transmission des savoirs (p. 227-241). La Dispute.

Brissaud, C. (2011). Didactique de l’orthographe : avancées ou piétinements ? Pratiques. Linguistique, littérature, didactique, 149-150, 207-226. https://doi.org/10.4000/pratiques.1740

Cèbe, S. et Goigoux, R. (2007). Concevoir un instrument didactique pour améliorer l’enseignement de la compréhension de textes. Repères. Recherches en didactique du français langue maternelle, 35(1), 185-208. https://www.persee.fr/doc/reper_1157-1330_2007_num_35_1_2756

Cogis, D. (2005). Pour enseigner et apprendre l’orthographe. Nouveaux enjeux–Pratiques nouvelles. École/Collège. Delagrave.

Fenoglio, P. (2019). Le hashtag pour catégoriser les erreurs d’orthographe au cycle 3 : un hiatus entre objectifs pédagogiques et appropriations des élèves. Repères. Recherches en didactique du français langue maternelle, 60, 131-151. https://doi.org/10.4000/reperes.2351

Fenoglio, P. (2020). Le pourquoi du comment. Cahiers Pédagogiques, 75(563), 26-28.

Fenoglio, P. et Brissaud, C. (2020). Entre tâche et activité : analyse des échanges langagiers d’élèves de cycle 3 lors de l’utilisation d’un outil de correction orthographique. Recherches en éducation, 40, 10-27. http://www.recherches-en-education.net/spip.php?article404

Fenoglio, P., Crinon, J. et Ferone, G. (2021, octobre). Confrontation des perceptions du numérique chez des enseignants et des élèves participant au dispositif Twictée [communication]. Colloque international Enseigner et apprendre l’orthographe à l’heure du numérique, Créteil, UPEC, France.

Goody, J. (1979). La raison graphique : la domestication de la pensée sauvage (J. Bazin et A. Bensa, Trad.). Les Éditions de Minuit.

Issaieva, É., Pini, G. et Crahay, M. (2011). Positionnements des enseignants et des élèves du primaire face à l’évaluation : une convergence existe-t-elle ? Revue française de pédagogie. Recherches en éducation, 176, 5-26. https://doi.org/10.4000/rfp.3362

Proulx, S. (2005). Penser les usages des TIC aujourd’hui : enjeux, modèles, tendances. Enjeux et usages des TIC : aspects sociaux et culturels, 1, 7-20.

Reuter, Y., Cohen-Azria, C., Daunay, B., Delcambre-Derville, I. et Lahanier-Reuter, D. (2013). Dictionnaire des concepts fondamentaux aux didactiques. De Boeck Supérieur.

Schneuwly, B. (2000). Les outils de l’enseignant. Un essai didactique. Repères : recherches en didactique du français langue maternelle, 22, 19-38.

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Jouer et apprendre, la ludification adaptative pour l’apprentissage des mathématiques

Stuart HALLIFAX

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Collège

 

 

Public

Enseignant·e·s de collège, professeur·e·s de mathématiques en collège, ingénieur·e·s pédagogiques

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À quelles questions cette étude tente-t-elle de répondre ?

Ce travail de recherche s’est intéressé à l’adaptation de la ludification (utilisation d’éléments de jeu dans des contextes non jeux pour l’engagement et la motivation) aux profils d’élèves dans le cadre de l’apprentissage des mathématiques. Nous nous sommes posé trois questions générales qui ont permis d’orienter ce travail :

  • À qui allons nous adapter notre ludification ? Qui sont les élèves qui vont utiliser l’environnement ? Comment pouvons-nous caractériser leurs préférences et motivations individuelles ?
  • Quels éléments de jeu pouvons-nous leur proposer ? Comment ces éléments peuvent-ils être conçus tout en prenant en compte le contexte éducatif ?
  • Comment pouvons-nous adapter nos éléments de jeu aux profils des apprenants ? Comment choisir les éléments de jeu les plus appropriés ?

Pourquoi ces questions sont-elles pertinentes ?

La ludification — utilisation des éléments de jeu dans des contextes non-jeux — est de plus en plus utilisée dans le domaine de l’éducation pour soutenir l’engagement, la motivation (intrinsèque mais aussi extrinsèque), et la performance des apprenants (Hamari et al., 2014 ; Koivisto et Hamari, 2019 ; Looyestyn et al., 2017). Beaucoup d’approches (commerciales) actuelles proposent des systèmes où les apprenants utilisent les mêmes éléments de jeu. Cependant, des études récentes montrent que les apprenants réagissent différemment aux éléments de jeu (Hallifax et al., 2019 ; Monterrat, 2015), et que leur motivation, leur engagement et leurs performances peuvent varier grandement en fonction des caractéristiques individuelles telles que la personnalité (Goldberg, 1992), les préférences pour les jeux vidéo (aussi appelé profil de joueur) (Tondello et al., 2016) et la motivation pour l’activité d’apprentissage (Vallerand et al., 1992). Les résultats indiquent que, dans certains cas, les éléments de jeu non adaptés aux apprenants peuvent au mieux n’avoir aucun effet sur la motivation des élèves, et au pire démotiver les apprenants. Il semble donc important d’adapter les éléments ludiques au profil des apprenants.

Quelle méthodologie de recherche a-t-on utilisée ?

Pour répondre à ces questions de recherche, nous avons mis en place un moodle (un environnement numérique d’éducation1 ludifié — appelé LudiMoodle — qui a été déployé dans 4 collèges de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Il a été utilisé par 258 apprenants de 4e pour l’apprentissage des mathématiques, plus précisément pour aborder la notion de calcul littéral.

Pour mettre en place ce prototype, nous avons mené une étude dans des conditions réelles, où les apprenants ont utilisé la plateforme LudiMoodle pendant leur cours de mathématiques. Le contenu pédagogique a été développé avec les enseignant·e·s participant au projet afin qu’il soit le plus approprié pour leur cours. Les éléments ludiques ont eux aussi été développés avec les enseignant·e·s lors de séances de co-conception avec les ingénieur·e·s pédagogiques, chercheur·euses, et les ingénieur·e·s moodle. Lors de ces séances de co-conception, nous avons utilisé un outil de conception à base de jeux de cartes et de plateau afin de faciliter la coopération et la discussion entre les différents acteurs. Finalement, les élèves ont eux aussi participé à la conception des éléments ludiques ; nous les avons interrogés lors de sessions de « focus group » après l’utilisation d’une première version de la plateforme. Au total, 6 éléments de jeu — représentant des « styles » de jeu — ont été implémentés dans la plateforme LudiMoodle : un avatar, un système de points, un classement, un système de badges, une course contre la montre, et une barre de progression sous la forme d’une fusée (voir le Tableau 1 pour une description de chaque élément de jeu).

Lors de l’expérimentation principale, les apprenants ont utilisé la plateforme au cours de 10 séances réparties sur 6 semaines. Chaque séance s’est déroulée de la même manière : 10-15 minutes de cours « papier » (distribué sous la forme d’un pré-imprimé à coller dans leur cahier afin de s’assurer que les apprenants aient le même contenu) suivi de 25/30 minutes de quiz sur la plateforme LudiMoodle (chaque séance comportait entre 4 et 10 quiz en fonction de leur longueur). Chaque élève s’est vu attribuer aléatoirement un élément de jeu qu’il a conservé pour toute la durée de l’expérimentation.

Avant d’utiliser la plateforme, les apprenants ont rempli un questionnaire permettant de déterminer leur profil de joueur « Hexad » (Tondello et al., 2016). Ils ont également rempli le questionnaire AMS (échelle de motivation académique) afin de déterminer leur motivation initiale pour l’apprentissage des mathématiques (Vallerand et al., 1992). À la fin des 10 séances, ils ont à nouveau rempli le questionnaire AMS ce qui nous a permis d’estimer l’évolution de leur motivation à apprendre les mathématiques et ainsi déterminer les effets de cet outil sur la motivation des élèves.

Initialement, une deuxième vague d’expérimentations LudiMoodle était prévue. Nous voulions tester une adaptation dite « dynamique » : en plus d’adapter le contenu ludique aux profils statiques des apprenants, nous souhaitions l’adapter aux comportements « en temps réel ». Malheureusement, les conditions sanitaires et le confinement induits par la pandémie de COVID-19 ne nous ont pas permis de mettre en place ces expérimentations, initialement prévues au printemps 2020. Toutefois nous allons pouvoir mener cette expérimentation au printemps 2021. Nous allons alors étudier les effets de ces adaptations sur la motivation des apprenants en comparant trois situations : (1) les apprenants utiliseront un élément de jeu aléatoire (tout comme dans la première vague expérimentale), (2) les apprenants utiliseront un élément de jeu sélectionné selon leur profil statique, (3) les apprenants utiliseront un élément de jeu initialement choisi selon leur profil statique, choix qui sera remis en question selon leur comportement (taux de bonnes réponses, stratégie de réponse, nombre de quiz tentés, etc.) en temps réel.

Tableau 1 – Description des 6 éléments de jeu utilisés dans LudiMoodle.
Élément de jeuDescription
AvatarLes élèves avaient un petit personnage qui gagnait des objets (vêtements, décorations, etc.) quand ils réussissaient des quiz. Chaque séance plaçait l’élève dans un univers différent (conte de fées, chevalier, etc.).
PointsLes élèves pouvaient gagner des points en répondant correctement aux questions. Ces points étaient affichés sous la forme d’un sac de pièces d’or indiquant leur total de points. Ils pouvaient gagner jusqu’à 1 000 points pour un quiz réussi à 100 %.
ClassementLes élèves étaient mis en compétition avec une classe fictive sous la forme d’une course. Plus ils donnaient de réponses correctes, plus ils amélioraient leur classement.
BadgesLes élèves pouvaient gagner jusqu’à trois badges par quiz suivant leur résultat (or pour 100 % de bonnes réponses, argent pour 85 %, bronze pour 70 %).
Course contre-la-montreLe temps de réponse des élèves aux questions posées étaient chronométrés. À chaque fois qu’ils arrivaient à battre leur temps de référence (médiane de leur temps passé sur les questions précédentes) un petit personnage en forme d’équerre courraient de plus en plus vite.
ProgressionLes élèves pouvaient faire avancer une fusée. À chaque bonne réponse elle avançait dans l’espace, avant d’atterrir sur la lune à la fin de la séance si l’élève avait donné suffisamment de bonnes réponses.





Le tableau offre une description des six éléments de jeu.
Concernant l’élément « Avatar », les élèves avaient un petit personnage qui gagnait des objets (vêtements, décorations, etc.) quand ils réussissaient des quiz. Chaque séance plaçait l’élève dans un univers différent (conte de fées, chevalier, etc.).


Concernant l’élément « Points », les élèves pouvaient gagner des points en répondant correctement aux questions. Ces points étaient affichés sous la forme d’un sac de pièces d’or indiquant leur total de points. Ils pouvaient gagner jusqu’à 1 000 points pour un quiz réussi à 100 %.


Concernant l’élément « Classement », les élèves étaient mis en compétition avec une classe fictive sous la forme d’une course. Plus ils donnaient de réponses correctes, plus ils amélioraient leur classement.


Concernant l’élément « Badges », les élèves pouvaient gagner jusqu’à trois badges par quiz suivant leur résultat (or pour 100 % de bonnes réponses, argent pour 85 %, bronze pour 70 %).


Concernant l’élément « Course contre-la-montre », le temps de réponse des élèves aux questions posées étaient chronométrés. À chaque fois qu’ils arrivaient à battre leur temps de référence (médiane de leur temps passé sur les questions précédentes) un petit personnage en forme d’équerre courraient de plus en plus vite.


Concernant l’élément « Progression », les élèves pouvaient faire avancer une fusée. À chaque bonne réponse elle avançait dans l’espace, avant d’atterrir sur la lune à la fin de la séance si l’élève avait donné suffisamment de bonnes réponses.



Quels résultats a-t-on obtenus ?

Suite aux expérimentations du projet LudiMoodle quatre résultats paraissent particulièrement intéressants à souligner :

  1. Relativement au contexte éducatif dans lequel nous nous sommes placés, l’approche de ludification non-adaptée (c’est-à-dire, utilisant des éléments de jeu attribués aléatoirement) provoque une démotivation générale caractérisée par une baisse des deux formes de motivation (intrinsèque et extrinsèque) ainsi qu’une augmentation de l’amotivation des apprenants face à l’apprentissage des mathématiques. Cependant ces effets sont différenciés lorsque nous regardons les éléments de jeu individuels : chaque élément de jeu a eu des effets différents sur la motivation des apprenants. De plus, nous avons observé que ces effets varient énormément en fonction du profil des apprenants, ce qui nous a permis de simuler plusieurs approches d’adaptation.
  2. Adapter les éléments de jeu selon le profil de joueur des apprenants a un effet sur leur comportement : ils répondent plus rapidement aux questions mais font plus d’erreurs.
  3. Adapter les éléments de jeu selon la motivation initiale des apprenants a un effet positif sur leur motivation intrinsèque : les apprenants trouvent plus de plaisir à apprendre des mathématiques.
  4. Adapter les éléments de jeu en tenant compte des deux profils (préférences de jeux et motivation initiale) de l’apprenant permet d’obtenir de meilleurs résultats : on observe un effet plus important sur la motivation intrinsèque et une baisse de l’amotivation. Les règles liées à cette approche d’adaptation sont présentées dans le Tableau 2.
Tableau 2 – Recommandations générales.
Éléments de jeuRecommandé pour les apprenants ayant un fort taux deÀ éviter pour les apprenants ayant un fort taux de
AvatarAmotivation, PlayerSocialiser
BagdesDisruptorMotivation Intrinsèque
Barre de progressionAmotivationMotivation Intrinsèque, Motivation Extrinsèque
ClassementFree SpiritMotivation Intrinsèque, Motivation Extrinsèque, Achiever, Disruptor
ScoreSocialiserMotivation Extrinsèque, Amotivation, Disruptor, Philanthropist
Contre-la-montreAmotivation, Achiever, Free SpiritMotivation Intrinsèque, Philanthropist





Le tableau présente, pour chacun des six éléments de jeu, les profils d’apprenants pour lesquels cet élément est recommandé ou au contraire est plutôt à éviter.


L’élément « Avatar » est recommandé pour les apprenants ayant un profil présentant un fort taux de « Amotivation » ou de « Player ». Il est à éviter pour les apprenants ayant un profil présentant un fort taux de « Socialiser ».


L’élément « Badges » est recommandé pour les apprenants ayant un profil présentant un fort taux de « Disruptor ». Il est à éviter pour les apprenants ayant un profil présentant un fort taux de « Motivation intrinsèque ».


L’élément « Barre de progression » est recommandé pour les apprenants ayant un profil présentant un fort taux de « Amotivation ». Il est à éviter pour les apprenants ayant un profil présentant un fort taux de « Motivation intrinsèque » ou de « Motivation extrinsèque ».


L’élément « Classement » est recommandé pour les apprenants ayant un profil présentant un fort taux de « Free spirit ». Il est à éviter pour les apprenants ayant un profil présentant un fort taux de « Motivation intrinsèque » ou de « Motivation extrinsèque » ou de « Achiever » ou de « Disruptor ».


L’élément « Score » est recommandé pour les apprenants ayant un profil présentant un fort taux de « Socialiser ». Il est à éviter pour les apprenants ayant un profil présentant un fort taux de « Motivation extrinsèque » ou de « Amotivation » ou de « Disruptor » ou de « Philanthropist ».


L’élément « Contre-la-montre » est recommandé pour les apprenants ayant un profil présentant un fort taux de « Amotivation » ou de « Achiever » ou de « Free spirit ». Il est à éviter pour les apprenants ayant un profil présentant un fort taux de « Motivation intrinsèque » ou de « Philanthropist ».



Que dois-je retenir de cette étude pour ma pratique ?

Tout d’abord, la première chose à retenir est que chaque apprenant a des préférences et des motivations différentes, et que ces préférences et motivations peuvent largement moduler l’effet des éléments de jeu.

Deuxièmement, les résultats de notre recherche sont très dépendants de notre contexte expérimental. En effet, le cours abordé, l’âge des apprenants, le type de collège, et même l’enseignant influent sur les effets observés. Changer ne serait-ce qu’un de ces paramètres pourrait faire varier nos résultats.

Cependant, nous pouvons présenter quelques règles générales tout en gardant à l’esprit que ces règles ne peuvent être perçues comme « une vérité absolue ». Il est donc important de les adapter au contexte éducatif dans lequel les élèves sont placés. Ainsi, en nous basant sur les résultats obtenus, nous avons pu dégager certaines règles d’attribution d’éléments ludiques en fonction du profil des apprenants (voir Tableau 2 pour l’ensemble des règles).

À titre d’exemple, face à un apprenant très fortement amotivé qui présenterait par ailleurs un caractère de type « Player » (c’est-à-dire, motivé par leur succès personnel, qui aime les compétitions dans lesquelles il peut gagner des récompenses), il est probable qu’un élément de jeu de type « Avatar » soit le plus adapté à son profil. Cependant, il est préférable d’éviter un élément de type « Avatar » pour un apprenant fortement « Socialiser » (c’est-à-dire, motivé par le contact social, l’interaction avec les autres) et favoriser un élément de jeu de type « Score« .

Références

Goldberg, L. R. (1992). The Development of Markers for the Big-Five Factor Structure. Psychological Assessment, 4(1), 26. http://psycnet.apa.org/journals/pas/4/1/26/

Hallifax, S., Serna, A., Marty, J.-C. et Lavoué, É. (2019). Adaptive Gamification in Education: A Literature Review of Current Trends and Developments. Dans M. Scheffel, J. Broisin, V. Pammer-Schindler, A. Ioannou et J. Schneider (dir.), European Conference on Technology Enhanced Learning (p. 294-307). Springer International Publishing.

Hamari, J., Koivisto, J. et Sarsa, H. (2014). Does Gamification Work ?–A Literature Review of Empirical Studies on Gamification. Dans 2014 47th Hawaii International Conference on System Sciences (HICSS), 3025-3034. IEEE. http://ieeexplore.ieee.org/abstract/document/6758978/

Koivisto, J. et Hamari, J. (2019). The Rise of Motivational Information Systems: A Review of Gamification Research. International Journal of Information Management, 45, 191-210. https://doi.org/10.1016/j.ijinfomgt.2018.10.013

Looyestyn, J., Kernot, J., Boshoff, K., Ryan, J., Edney, S. et Maher, C. (2017). Does Gamification Increase Engagement with Online Programs? A Systematic Review. PloS One, 12(3), e0173403. http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0173403

Monterrat, B. (2015). Un système de ludification adaptative d’environnements d’apprentissage fondé sur les profils de joueur des apprenants [thèse de doctorat, INSA de Rennes, Rennes, France]. https://hal.archives-ouvertes.fr/tel-01255382/

Tondello, G. F., Wehbe, R. R., Diamond, L., Busch, M., Marczewski, A. et Nacke, L. E. (2016). The Gamification User Types Hexad Scale. Dans Proceedings of the 2016 Annual Symposium on Computer-Human Interaction in Play (p. 229-243). ACM. http://dl.acm.org/citation.cfm?id=2968082

Vallerand, R. J., Pelletier, L. G., Blais, M. R., Briere, N. M., Senecal, C. et Vallieres, E. F. (1992). The Academic Motivation Scale: A Measure of Intrinsic, Extrinsic, and Amotivation in Education. Educational and Psychological Measurement, 52(4), 1003-1017.

Catégories
Ressources

Logiciel éducatif LUCIOLE

 LUdique au service de la Compréhension Orale en Langue Etrangère

Logo de l'application Luciole

Niveaux

Cycle 2 (voire cycle 3)

 

Action/Projet associé(e)

Présentation

Luciole est un jeu qui s’adresse principalement aux enfants de 6 à 8 ans (Cycles 2 et 3). Dans Luciole, le joueur incarne Sasha, un français d’environ 8 à 10 ans qui se fait recruter par un agent secret anglais. Au cours de plusieurs missions Sasha, accompagné de son mentor (tantôt Ash, puis Beth) et de l’entraîneur des espions (Hartguy), va parcourir le monde anglophone : Londres, d’abord, puis la Grande-Bretagne. Son but est d’arrêter des « bad guys » qui ont enlevé des animaux. Pour retrouver et libérer les animaux, Sasha devra acquérir et développer ses compétences en compréhension orale de l’anglais.

Luciole alterne les phases de narration et d’action. La trame narrative fournit un contexte fictionnel prétexte à la définition d’un environnement culturel et linguistique. L’action est divisée en de multiples mini-jeux ayant des objectifs très différents : l’introduction de notions linguistique, leur ancrage mémoriel et leur mobilisation dans des taches de compréhension plus complexes. Chaque jeu est justifié et soutenu par la narration. Les modalités de jeux sont très diverses et mobilisent des modalités d’interaction classiques mais aussi l’intégration de l’espace classe comme espace de jeu par le biais de QR codes. Les mini-jeux sont rejouables afin que le joueur puisse gérer sa progression avant d’aborder les activités les plus complexes : en effet, plus le joueur avance et plus les énoncés auxquels il est confronté sont complexes.

Luciole cible principalement la compréhension orale en anglais, mais doit permettre aux enfants d’acquérir diverses compétences fondées sur les Instructions Officielles. En effet, les aventures du protagoniste principal vont l’emmener à rencontrer différents personnages qui lui transmettront des connaissances linguistiques et culturelles, mais aussi d’ordre stratégique. L’apprenant sera amené à accepter les erreurs linguistiques (de français) de ses partenaires anglophones, dédramatiser l’erreur et s’en servir pour en apprendre plus sur la langue et la culture.

Au cours de l’expérimentation menée dans le projet Fluence, Luciole a montré qu’il améliorait non seulement les compétences en anglais des apprenants mais aussi leur conscience phonologique en français. Le projet Luciole a mobilisé plusieurs sous-traitants industriels et a été réalisé avec le soutien du Service des Langues de l’Université Grenoble Alpes en mobilisant des chercheurs du Lidilem (EA 609), mais il a également bénéficié du travail de chercheurs du LIRIS (UMR 5205, Lyon), du laboratoire ICAR (UMR 5191, Lyon) et de TransCrit (EA 1569, Paris).

Ci-après, quelques captures d’écran du jeu :

Disponibilité

En attendant une diffusion plus large, le jeu est accessible sur demande. Il fonctionne sur Android et iOS.

Catégories
Ressources

Logiciel d’entraînement EVASION

Entraîner les traitements visuels et visuo-attentionnels impliqués en lecture

Logo de l'application Evasion

Niveaux

À partir de la grande section de maternelle

Action/Projet associé(e)

Présentation

Lire implique la mobilisation de plusieurs compétences. Certaines sont généralement bien entrainées (par exemple, les relations grapho-phonémiques) alors que d’autres ne le sont que très peu, voire jamais ; c’est le cas de l’attention visuelle. L’attention visuelle permet un encodage en parallèle de plusieurs unités textuelles. L’identification de lettres ou de séquences de lettres est ainsi d’autant plus efficace que l’attention visuelle est développée. Il en résulte que l’attention visuelle des élèves a un impact direct sur leur apprentissage de lecture mais aussi sur leur compétence en orthographe. C’est en tous les cas, ce qui a été montré par la conception, le développement et la validation en situation écologique d’un entrainement à l’attention visuelle, EVASION.

EVASION est ainsi une application pour tablettes tactiles dont l’objectif est l’entrainement du déploiement de l’attention visuelle et du traitement visuel des lettres. Elle se présente sous la forme de 4 mini-jeux d’action. Dans chaque mini-jeu, il est demandé aux joueurs d’identifier des séquences de lettres cibles parmi des séquences de lettres distractrices. Ces éléments sont mis en scène dans des cinématiques spécifiques (par exemple, dans des déplacements de droite à gauche, en tous sens dans un labyrinthe 2D, etc.). L’application intègre aussi un algorithme adaptatif (Parseval) qui permet de maintenir un niveau de difficulté adapté au joueur tel que ce dernier ait environ 75 % de chance de réussite. Ainsi, lors de chaque partie, différents éléments sont contrôlés comme la longueur et la complexité des éléments textuels affichés ou le taux de distracteurs. Ce seuil permet de maintenir une difficulté qui ne paraisse ni trop faible ni trop élevée au joueur.

EVASION a été testé dans l’académie de Grenoble et de Mayotte (voir aussi la page web relative à la thèse de Svetlana Meyer), auprès d’élèves avec ou sans difficultés apparentes en lecture, en grande section de maternelle (GSM) et en CP. Il a aussi été testé auprès d’élèves de 6e, primo ou en difficulté de lecture. Actuellement, les résultats montrent que la dernière version de l’application permet bien d’augmenter les compétences en attention visuelle chez les élèves mahorais en CP. Des effets positifs se retrouvent également en lecture et écriture de mots et pseudo-mots. Des analyses sont encore en cours pour confirmer qu’il en est de même pour les collégiens de cette académie et pour les GSM de métropole.

L’application EVASION a été conçue et évaluée par le laboratoire LPNC. Le développement a été réalisé par un prestataire, Xiwen Studio.

Disponibilité

EVASION est réservé à un usage dans les écoles et par les orthophonistes. L’outil n’est actuellement pas diffusé en dehors des académies de Grenoble et de Mayotte.